Le finnois dispose de différents déterminants (démonstratifs, indéfinis, interrogatifs etc.), mais pas de mots directement équivalents aux articles français un ou le. Cependant, on peut trouver assez facilement des indices qui permettent de choisir la bonne forme d’article en français dans environ 70% des cas. Ces indices sont mentionnés et analysés dans les pages consacrées aux articles, et résumés ici.
Les équivalents proposés ici s’utilisent en finnois essentiellement dans le code écrit courant (yleiskieli) ou le finnois parlé. Dans le code écrit strict (kirjakieli), on ne les emploie quasiment jamais. Mais le finnois parlé est très utile au moins pour tester la possibilité de l’utilisation de l’article indéfini.
■ sellainen (sellane) (catégorisation) = un/une/des
Se oli sellane drone. C’était un drone. ■ Ne oli sellasia kunnon sipuleita. C’était de vrais ognons. ■ Se oli sellane mukava pikku puisto. C’était un petit parc sympa.
En finnois, on utilise aussi sellainen avec cette valeur dans le code écrit, mais de façon nettement moins systématique.
■ joku (nature indéfinie) = un/une/des
Löysin jonkun maksukortin, mitä teen? J’ai trouvé une carte bancaire. Qu’est-ce que je fais ? ■ Kerrankin mä löysin jonkun hyvän tarjouksen. Pour une fois j’ai trouvé une bonne promo.
En finnois, on utilise aussi jokin/joku avec cette valeur, mais assez rarement.
■ joitain (nature indéfinie et quantité indéfinie) = des
Tarvetta ois vielä ostaa joitain juttuja kotiin. Il faudrait que j’achète encore des trucs pour la maison.
En finnois, on utilise aussi fréquemment joitakin dans le code écrit avec ce même sens.
■ yksi (identité non précisée); au pluriel yksiä ou joitain = un/une/des
Joo, ootas hetki ku teen yhen jutun nopeasti. Attends, je fais un truc vite fait. Ostin yhden kirjan. J’ai acheté un livre. ■ Alkukesästä ostin yksiä vieraita varten monta pakettia. Au début de l’été j’en ai acheté plusieurs paquets pour des invités. ■ Netistä löysin joitain sivuja koodaamisesta. Sur internet, j’ai trouvé des pages sur le codage.
En finnois, dans le code écrit l’équivalent de yksi est eräs (ou muuan dans le style soutenu).
Dans tous ces cas, si en finnois on peut utiliser sellainen / joku / joitain / yksi, en français il y a un article indéfini.
Il existe plusieurs indices en finnois qui permettent de décider si on emploie un article défini en français.
■ le déterminant se peut exprimer une référence spécifique, comme le/la/les :
Sinunhan piti tuoda tuoleja. No toitko ne tuolit? Tu devais apporter des chaises. Alors ? Tu les as apportées, les chaises ? ■ Piti mennä sisälle hakemaan autotallin avaimen, ja sitten kun tulin autotallin, huomasin, että taas ei ollut sitä avainta, kun otin väärän avaimen. J’ai dû rentrer pour chercher la clé du garage et quand je suis retourné au garage, j’ai vu que je n’avais de nouveau pas la clé, parce que j’en avais pris une mauvaise.
■ Si en finnois un nom singulier ou pluriel de sens générique (c’est-à-dire désignant les éléments d’un groupe, ou un ensemble) ne peut pas être précédé de yksi/ jokin/ jotkut/ joitain, il a comme équivalent en français un nom déterminé par un article défini. C’est très souvent le cas s’il est en fonction de sujet du verbe de la phrase (mais aussi dans d’autres positions) :
La ville est un environnement stressant. ■ En Finlande, le mois d’avril [=tous les mois d’avril] est très sec. ■ En France, à une époque les magasins étaient fermés le lundi matin. ■ Työntekijöiden ja työnantajien välinen kokous epäonnistui. La rencontre entre les ouvriers et les patrons a été un échec.
■ Quand un nom massif est sujet du verbe, en français il ne peut pas être déterminé par un article indéfini massif. Il est alors habituellement précédé d’un article défini :
Kahvi edistää ruoansulatusta. Le café a un effet bénéfique sur la digestion. ■ Sähkö on yhä kalliimpaa. L’électricité devient de plus en plus chère.
■ les noms finnois en -minen ou les autres noms déverbatifs, avec le suffixe -ointi, -lu/ly, -ismi etc. utilisés en fonction de sujet (ou de complément d’un verbe à la forme affirmative) correspondent presque toujours à un nom avec article défini en français :
Keskittyminen on tärkeää. La concentration est importante. ■ Pysäköinti aiheuttaa usein haittoja asutukselle. Le stationnement est souvent source de nuisances dans les zones résidentielles. ■ Kävely kohentaa kuntoa. La marche est bonne pour la forme. ■ Turismi tuo sekä vaurautta että ongelmia. Le tourisme est source à la fois de richesse et de nuisances.
Quand les noms sont employés comme complément du verbe ou comme complément de phrase, ces équivalences ne sont plus aussi nettes. On peut cependant toujours utiliser le test de se ou yksi/joku : si on peut utiliser se ou on ne peut pas utiliser yksi/ jokin/ jotkut/ joitain devant le nom en finnois, il y a de fortes chances qu’on utilise un article défini en français.
En revanche, le cas (sijamuoto) du complément du verbe en finnois ne permet que rarement de décider si le nom est précédé d’un article défini ou indéfini en français. L’opposition monikon genetiivi-akkusatiivi / monikon partitiivi correspond à l’opposition article défini pluriel / article indéfini pluriel uniquement si les trois conditions suivantes sont réunies :
✍Ces conditions représentent environ seulement 5% des cas possibles !
Le verbe manquer peut avoir des sens et des constructions variés et les verbes équivalents en finnois ont souvent une construction tout à fait différente. En français, ces différences se voient aussi dans la forme de l’article utilisé devant le complément du verbe.
a. Manquer intransitif (sans complément) signifie epäonnistua. Il est synonyme d’échouer ou, dans le français parlé, de rater :
La tentative a manqué. ■ Le coup a manqué.
b. Il existe une deuxième forme de manquer sans complément, mais où le verbe est en réalité un verbe transitif employé absolument, autrement dit c’est le verbe manquer à, dont le complément n’est pas exprimé. Dans ce cas cas, manquer (à) signifie olla poissa ou puuttua (dans ce sens, le sujet est souvent postposé et le verbe est précédé de l’indice de personne verbale il) :
Deux élèves manquent aujourd’hui. ■ Cent euros manquent encore pour compléter la somme. ■ Il manque trois livres sur l’étagère. ■ Dans cette liste, il manque les verbes irréguliers.
c. Manquer qch transitif direct (se construisant avec un complément de verbe direct) signifie jäädä paitsi, jäädä pois, myöhästyä ou ampua ohi (synonyme familier : rater) :
À cause de la grève des transports, de nombreux étudiants ont manqué le cours. ■ Le réveil n’a pas sonné, c’est pourquoi j’ai manqué le train de 8 h. ■ L’élan était trop loin, je l’ai manqué. Hirvi oli liian kaukana, ammuin ohi. ■ Tu as manqué une belle occasion de faire un beau voyage, c’est dommage !
d. Manquer à qch : puuttua jstak. Souvent construit avec sujet postposé et verbe précédé de l’indice de personne verbale il :
Les deux premiers romans de l’auteur manquent encore à ma collection. ■ Il manque encore une personne au groupe (ou : dans le groupe).
e. Manquer à qqn : puuttua joltakulta, construit avec indice de personne verbale il et inversion du sujet :
Il manque seulement deux points à ce coureur pour devenir champion du monde.
Il lui manque encore un examen.
f. Manquer à qqn a également le sens particulier de olla jonkun kaipuun kohde. Il peut donc se traduire par les verbes finnois kaivata ou ikävöidä, qui se construisent cependant tout à fait différemment :
français : A manque à B.
Finnois : B ikävöi A:ta.
Tu manques beaucoup à ta mère. Äitisi kaipaa kovasti sinua. ■ Reviens vite, tu lui manques tellement ! Tule pian takaisin, hänellä on niin ikävä sinua. ■ Mon pays natal me manque. Kaipaan kotimaatani.
g. Manquer de qch : olla vailla jotakin, olla jnk puutteessa. Ce verbe peut donc traduire couramment tarvita ou kaivata, mais ceux-ci se construisent différemment (avec un complément direct). Comme le verbe est formé avec la préposition de, l’article indéfini (pluriel et massif) est toujours effacé :
Je manque de temps. ■ Il manque d’ambition. ■ Cette soupe manque de sel. ■ La commune manque de ressources. ■ L’institut manque de personnel. ■ Nous manquons de temps et d’argent. ■ Tu manques d’ambition et d’idées.
De plus, dans le cas du verbe manquer de qch (g. ci-dessus), il y a une limitation importante : on ne peut utiliser le verbe manquer de dans le sens de «olla vailla jotakin, tarvita jotakin» qu’avec un nom comptable pluriel ou massif introduit par un article indéfini. On ne peut pas utiliser le verbe manquer de avec un nom comptable singulier indéfini ni avec un déterminant défini. Ainsi, bien que cette phrase se trouve dans un manuel finlandais de grammaire française, il est agrammatical de dire *nous manquons d’un employé (pour traduire meiltä puuttuu [yksi] työntekijä), ou bien (exemples d’erreurs relevées dans des travaux d’étudiants) :
*Nous manquons encore de l’argent. Meiltä puuttuu vielä rahaa.
*Nous manquons du premier manuel. Meiltä puuttuu ensimmäinen kirja.
*Ils manquent de cette subvention. Heiltä puuttuu se apuraha.
*Ces manuels manquent aussi bien des précisions que des explications nécessaires.
Si on veut exprimer l’idée de « olla vailla jotakin, tarvita jotakin» avec un nom comptable singulier indéfini ou avec un autre déterminant, il faut utiliser les constructions impersonnelles il faut à qqn / il manque à qqn + GN ou d’autres verbes :
Il nous manque un employé. / Il nous faut un employé.
Il nous manque encore l’argent. / Il nous faut encore l’argent.
Il nous manque le premier manuel. / Nous n’avons pas pu trouver le premier manuel.
Il leur manque cette subvention. / Il leur faut cette subvention.
Il manque dans ces manuels les explications et les précisions nécessaires.
Les finnophones ont souvent beaucoup de mal à comprendre qu’on utilise un article indéfini en parlant des parties du corps dans les constructions comme avoir les cheveux blonds, avoir les yeux bleus etc. Le problème didactique est double :
En finnois, dans la construction jollak on gn pluriel (qqn a gn), les parties du corps qui vont par paires (et certains objets, comme ciseaux, lunettes etc.) sont souvent au nominatif pluriel :
Hänellä on kauniit silmät. ■ Hänellä on pitkät sääret.
alors que dans ce ce genre de construction, dans le cas de noms pluriels ordinaires (qui ne forment pas des paires), le GN au partitiivi pluriel :
Hänellä on hyviä ystäviä. ■ Minulla on kauniita kukkia. etc.
Le premier problème, c’est que l’apprenant débutant, aveuglé par la correspondance erronée monikon nominatiivi = määräinen artikkeli, pense qu’on utilise dans ce cas toujours l’article défini ; les débutants traduisent quasi automatiquement hänellä on pitkät sääret en utilisant un article défini : elle a *les longues jambes. Or, en français, s’il n’y a pas de valeur référentielle particulière, on utilise normalement l’article indéfini, comme dans les trois exemples suivants, où le finnois utilise un nominatif pluriel en -t :
Tu as des yeux pour regarder, non ? Katso nyt kunnolla, sinullahan on silmät. ■ Il a de beaux yeux. Hänellä on kauniit silmät [de = article indéf. plur. devant adjectif antéposé] ■ Elle a de longues jambes. Hänellä on pitkät sääret.
Ceci est déroutant pour les finnophones, pour qui un indéfini pluriel (ici monikon partitiivi) paraitrait vraiment étrange : la traduction littérale de tu as des yeux par sinulla on silmiä signifierait en quelque sorte « tu as des yeux un peu partout sur le corps » (comme tu as des boutons). Le problème est dû au fait que le français ne connait pas et n’a aucun moyen d’exprimer l’idée de globalité par paire qu’exprime le nominatiivi pluriel dans sakset, silmät, housut. On peut dire indifféremment les ciseaux ou des ciseaux, les yeux ou des yeux.
Pour ajouter à la confusion, par un hasard extraordinaire, on trouve en français des constructions similaires à celles du finnois telles que hänellä on siniset silmät avec un article défini (il a les yeux bleus). Ces constructions semblent indiquer une correspondance entre article défini français et nominatif pluriel finnois (les yeux bleus – siniset silmät), et semblent confirmer en quelque sorte la règle monikon nominatiivi = määräinen artikkeli.
En réalité, il s’agit d’une construction où l’adjectif est attribut du complément direct (objektipredikatiivi), et dans ce cas, l’adjectif est placé après le nom, mais n’est pas un élément du groupe nominal de ce nom :
Il a les yeux bleus. ■ Elle a les cheveux bruns. ■ Il a les jambes poilues.
De plus, une construction comme il a les yeux bleus ne s’utilise habituellement qu’avec certaines parties du corps et avec certains adjectifs. On dit nettement plus rarement elle a les jambes grosses ou tu as les yeux grands. Dans certains cas, on peut utiliser l’article défini, par exemple Elle a les longues jambes de sa mère ou Tu as les beaux yeux de ta fille etc., mais dans ce cas-là cet article renvoie à un possesseur différent et, surtout, l’adjectif fait partie du groupe nominal (nom+adjectif), et n’est pas l’attribut du complément direct.
Comme l’article défini s’utilise du déterminant possessif devant les parties du corps, la référence dénotée par l’article défini est explicitée par d’autres indices référentiels (nom ou pronom sujet) et le possessif devient alors inutile :
Après cette longue marche, j’ai mal aux pieds = les pieds du sujet je.
Elle s’est cassé le fémur = le fémur du sujet elle. Häneltä meni reisiluu poikki.
Ce mode de référence s’utilise de façon caractéristique dans les constructions avec le verbe avoir suivi d’un complément de verbe direct et d’un attribut du complément [avoir gn + adjectif] utilisées pour décrire quelqu’un physiquement :
Aino a les yeux bleus et les cheveux blonds, mais son père a les cheveux bruns.
Cette construction avec attribut du complément (objektipredikatiivi) s’interprète ainsi : il a les cheveux blonds signifie mot à mot « hänellä on tukka vaaleana » (on le voit dans la construction disloquée : les cheveux, il les a blonds). Exactement comme en finnois, dans cette construction l’adjectif se place toujours après le nom. On ne peut pas dire qu’il est « postposé », car il ne s’agit pas d’un adjectif du groupe nominal. On n’emploie cependant pas systématiquement l’article défini pour exprimer la possession
En général, on utilise cette construction seulement avec certaines parties du corps, pour caractériser les traits distinctifs habituels de l’être humain. Il s’agit de traits objectifs facilement constatables, qui n’impliquent pas réellement de jugement de valeur (yeux bleus-bruns, cheveux noirs-bruns-blonds etc.). L’utilisation de l’article défini n’est cependant pas obligatoire quand on décrit une personne : on peut toujours utiliser l’article indéfini ; on insiste alors plus sur la valeur caractérisante de l’adjectif (évaluation subjective) :
Il a les yeux bleus. ■ Non, je dirais plutôt qu’il a des yeux gris.
Quand on modifie l’adjectif (par exemple avec très), l’article indéfini est plus fréquent. De toute façon, l’article défini ne peut pas s’utiliser avec toutes les parties du corps ni avec n’importe quel adjectif :
Elle avait des yeux très bleus et un petit nez.
En cas de doute, il vaut donc mieux utiliser l’article indéfini.
La construction avec attribut du complément avoir + article défini + cod + adjectif n’est pas utilisée seulement pour donner le « signalement » de quelqu’un : on peut l’utiliser librement pour décrire un état momentané ou provisoire d’une partie du corps ou de quelque chose. Le finnois utilise par exemple dans ce cas l’essif ou des constructions avec adjectif :
Tu as le dos tout gris de poussière. ■ Il avait le nez tout rouge. ■ L’alpiniste avait les traits tirés de fatigue. ■ La voiture avait le côté tout cabossé.
Même si elle est limitée à certaines parties du corps et à certains adjectifs, la construction avec attribut du complément peut s’utiliser assez facilement si on ajoute un adverbe : elle a les jambes très grosses. L’article défini est donc utilisé pour une raison tout à fait différente de celle pour laquelle on utilise un nominatif pluriel en finnois. Cette correspondance est trompeuse et dangereuse. Il vaudrait donc mieux retenir comme règle de base que pour caractériser les parties du corps, on utilise normalement un article indéfini et que l’article défini est une exception.
La locution avoir le temps est un bon exemple d’expression dans laquelle la forme d’article s’est plus ou moins « figée », et ce sous une forme qui peut sembler illogique à l’apprenant de français langue étrangère. Ainsi, les finnophones (entre autres) utilisent souvent à tort la forme avoir du temps dans des contextes où on emploie en français avoir le temps. L’emploi de la forme avec article du est en soi parfaitement rationnelle, puisqu’elle est analogue à de nombreuses constructions similaires, dans lesquelles l’article massif correspond à un partitiivi en finnois :
Minulla on rahaa. J’ai de l’argent.
Hänellä oli onnea. Il a eu de la chance.
Il serait donc logique qu’on dise, sur le même modèle :
Minulla on aikaa. J’ai du temps.
Pourtant et de façon surprenante, ce n’est pas le cas. Le plus souvent, quand on veut dire qu’on a « du temps » pour faire quelque chose, dans l’expression avoir + temps, on utilise l’article défini. En effet, l’expression est développée par un complément (infinitif) qui précise (« définit ») le temps dont il s’agit, exactement sur le modèle d’autres noms complétés par un infinitif. Comparer :
J’ai eu l’occasion de lui parler plusieurs fois.
Nous avons eu la chance de pouvoir visiter ce musée habituellement fermé au public.
Vous aurez le temps de découvrir la ville lors de la visite guidée.
Les phrases finnoises suivantes se traduisent donc :
(a) Olisiko teillä aikaa tarkistaa teksti ? Est-ce que vous auriez le temps de vérifier le texte ?
(b) Hänellä ei ole aikaa siihen. Il n’a pas le temps de le faire.
(c) Olisiko teillä aikaa ottaa minut vastaan? Auriez-vous le temps de me recevoir ?
(d) Voisitteko lukea tekstin, jos teillä on aikaa? Pourriez-vous lire le texte, si vous avez le temps ?
(e) Minulla ei ole nyt aikaa. Je n’ai pas le temps maintenant.
Dans tous ces exemples, à un partitiivi finnois correspond en français un article défini, qui s’explique pour la raison mentionnée ci-dessus (le temps est complété par un infinitif). Cet article défini s’emploie même quand le verbe qui développe la locution avoir le temps n’est pas exprimé (exemples d et e). En effet, l’expression avoir le temps est toujours implicitement suivie d’un verbe sous-entendu : dans l’exemple (d), ce verbe pourrait être de lire le texte, dans l’exemple (e) de vous recevoir, de t’aider, de regarder la télé etc., en fonction du contexte.
Normalement, si on n’exprime pas le complément infinitif de l’expression avoir le temps, on peut le reprendre par un pronom. Dans ce cas, on utilise le pronom en :
Relisez le texte en entier, si vous en avez le temps [= si vous avez le temps de le relire], et voyez quelles sont les modifications qu’il faut faire.
Nous aurions souhaité prendre connaissance de ce nouveau document, mais nous n’en avons pas eu le temps [= pas eu le temps de prendre connaissance du document].
Je terminerai ce rapport dès que j’en aurai le temps [= j’aurai le temps de terminer ce rapport].
Dans le code écrit, on exprime régulièrement ce pronom en, mais dans la langue courante, on l’omet généralementt :
Passez chez nous ce soir, si vous avez le temps. [= si vous en avez le temps]
Jette un coup d’œil là-dessus, si tu as le temps. [= si tu en as le temps]
Je terminerai ce rapport dès que j’aurai le temps. [= dès que j’en aurai le temps]
C’est là que que se trouve la solution de l’énigme (pour les finnophones, au moins) de l’emploi de l’article défini ; l’article défini le (avoir le temps) s’explique par la présence d’un complément infinitif « caché » :
Passez chez nous ce soir, si vous avez le temps [de passer].
Jette un coup d’œil là-dessus, si tu as le temps [d’y jeter un coup d’œil].
Je terminerai ce rapport dès que j’aurai le temps [de le faire/de m’y mettre].
La forme avoir du temps n’est pas du tout agrammaticale, simplement elle est nettement moins usitée dans la pratique courante pour exprimer l’idée de ehtiä, olla aikaa tehdä jotakin. On peut dire que la forme « passepartout » est la forme avoir le temps. Dans la langue familière, on peut même utiliser cette construction sans renvoyer spécifiquement ou implicitement à un verbe, donc pour dire simplement « avoir du temps pour faire qch » :
Tu aurais le temps, là ?Olisiko sinulla aikaa nyt? ■ Désolé, je n’ai vraiment pas le temps.
Tu pourrais m’aider un peu ? ■ J’ai pas le temps !
On peut se voir ce soir ? ■ Pas le temps !
Dans ces constructions, il y a également un complément implicite (je n’ai vraiment pas le temps de m’occuper de toi / J’ai pas le temps de t’aider / Pas le temps de venir/de passer).
La forme avec article massif avoir du temps s’utilise pour indiquer une quantité de temps plus concrète et signifie le plus souvent « avoir du temps libre » (joutilasta aikaa, vapaa-aikaa), un espace de temps où on n’est pas occupé :
J’ai un peu de temps, on pourrait aller prendre un verre ?
Elle n’a pas beaucoup de temps en général, elle est toujours à courir à droite et à gauche.
Avoir du temps ? Ça s’apprend ! [titre de livre]
Donc, si on demande à quelqu’un Est-ce que vous avez du temps ?, la question signifie en quelque sorte « Est-ce que vous avez du temps libre ? ». Or, quand on demande en finnois Olisiko teillä aikaa?, on ne demande pas si la personne a du temps libre en général (vapaa-aikaa), mais si elle peut trouver, dans son emploi du temps, un moment pour faire quelque chose. En général, on pose justement cette question parce qu’on suppose que la personne n’a pas de temps libre. Si la personne répond j’ai le temps, c’est qu’elle peut trouver un espace de temps pour faire la chose qu’on demande. Si elle répondait j’ai du temps, cela signifierait (presque) « Minulla on ruhtinaallisesti aikaa », « minulla ei ole muuta kuin aikaa ».
On peut noter également que chacune des deux constructions est suivie d’une préposition différente (les apprenants de français langue étrangère confondent souvent les deux) :
avoir le temps de faire quelque chose
avoir du temps pour quelque chose ou pour faire quelque chose
On constate que seule la forme avoir du temps (pour) peut être suivie d’un GN (voir cependant §5 ci-dessous). La forme avec article massif avoir du temps indique donc une quantité de temps. C’est pourquoi on la trouve fréquemment après des déterminants de quantité, et dans diverses expressions où on envisage toujours une quantité de temps concrète :
avoir du temps à consacrer à quelqu’un, avoir du temps devant soi, avoir du temps à tuer ■ Tu as un peu de temps pour regarder cette histoire ? ■ Demain, j’aurais peut-être un peu de temps pour vous. ■ Il faudrait que j’aie plus de temps. ■ Je n’ai pas de temps à perdre avec ces sottises. ■ Il n’y a pas de temps à perdre, il faut immédiatement aller à l’hôpital.
C’est ainsi qu’on peut opposer :
Est-ce que vous avez le temps de vous consacrer à vos enfants ? Ehdittekö olla lastenne kanssa?
Est-ce que vous avez du temps à consacrer à vos enfants ? Onko teillä aikaa lapsillenne?
Il ne prend pas de vacances, il n’a jamais le temps. Hän ei pidä lomaa. Hän ei ehdi tehdä sitä.
Il ne prend pas de vacances, il n’a jamais de temps pour ça. Hän ei pidä lomaa, hänellä ei ole aikaa sellaiseen.
On peut ainsi envisager plusieurs réponses à une même question :
Est-ce que vous avez le temps d’aller au cinéma pendant la semaine ?
– Non, je n’ai pas le temps. [sous-entendu : d’y aller]
– Non, je n’en ai pas le temps. [même réponse, mais d’y aller pronominalisé sous la forme en]
– Je n’ai pas de temps pour ça. / Je n’ai plus de temps pour ça.
Comme on le voit, la différence n’est pas toujours facile à apprécier. De plus, dans l’usage de la langue courante (comme pour compliquer les choses du point de vue de l’apprenant de français langue étrangère) les locuteurs mêlent parfois les deux constructions, puisqu’elles ont, malgré tout, un sens assez proche. Malgré ce qui vient d’être expliqué, il ne faut donc pas s’étonner de trouver les formes suivantes :
Je n’ai pas le temps pour des passe-temps !
[On attendrait plutôt : pas de temps pour]
Je n’ai pas le temps pour ces choses-là, répondit un jeune homme pressé de s’assurer une bonne place dans le stade.
[On attendrait plutôt : pas de temps pour, mais je n’ai pas le temps signifie « je suis trop pressé ». La phrase s’analyse donc comme une construction analogue à Je suis trop pressé pour ces choses-là.]
Après je mets les mains dans le cambouis pour adapter le script, mais là j’ai pas le temps pour développer de A à Z un script. [même remarque]
La règle à retenir pour les finnophones est qu’on demande généralementt à quelqu’un Est-ce que tu as/vous avez le temps ? et non pas du temps, même si en finnois on veut dire olla aikaa. De même, en réponse, on dira le plus souvent je n’ai pas le temps.
Il y a une ressemblance trompeuse entre les constructions faire du violon/ du piano/ de la flute etc. et jouer du violon/ du piano/ de la flute. Malgré les apparences, les deux expressions ne reposent pas sur la même construction. Dans le cas de jouer du violon, les apprenants de français langue étrangère et probablement une grande partie des francophones eux-mêmes comprennent du comme un article massif, par analogie avec les constructions comme faire du tennis, faire du foot, faire du piano, faire de la guitare etc.
Pourtant, quand le complément du verbe jouer désigne un instrument de musique (jouer signifiant dans ce cas « savoir utiliser », « pratiquer » tel ou tel instrument), le verbe se construit avec la préposition de. On dit jouer d’un instrument, qu’on peut traduire en finnois soittaa jotain soitinta ou tout simplement harrastaa musiikkia :
Est-ce que tu joues d’un instrument ?
De quel instrument savez-vous jouer ?
La construction jouer du violon/du piano/de la flute etc. s’interprète donc comme jouer de + article défini + nom (l’article défini est employé ici avec une valeur générique). Autrement dit, dans jouer du violon, le groupe du violon est un groupe prépositionnel, qui est le complément de verbe prépositionnel du verbe jouer. Le mot du est donc une forme contracte de+le et non pas un article indéfini massif :
jouer de + un instrument → jouer d’un instrument
jouer de + la trompette → jouer de la trompette
jouer de + le violon → jouer du violon
jouer de + le piano → jouer du piano
La preuve que de fait bien partie de la structure verbale est qu’on l’utilise aussi devant d’autres déterminants, et la suite avec article défini s’intègre parfaitement dans cette série :
Il joue d’un instrument rare, le cimbalum. ■ Elle jouait de cette guitare avec une grande virtuosité. ■ Raymond Devos savait jouer de plus de dix instruments. ■ Pour ne pas déranger les voisins, Clément avait acheté un piano électrique, dont il joue finalement assez peu.
Le verbe faire suivi du nom d’un instrument introduit par un article massif a le même sens que jouer de et s’utilise plus fréquemment dans la langue courante que jouer de :
faire du violon = jouer du violon
faire de la clarinette = jouer de la clarinette
faire du basson = jouer du basson
Comme le verbe faire du signifier « pratiquer régulièrement », on ne l’utilise généralementt pas pour les instruments dont on joue seulement occasionnellement. C’est ainsi qu’on dira jouer du triangle plutôt que faire du triangle, ou jouer du célesta plutôt que faire du célesta. De même, on ne peut pas rendre l’idée de « savoir jouer d’un instrument » en disant faire un instrument (*Est-ce que tu fais un instrument ? dans le sens de « Est-ce que tu joues d’un instrument ? »). Faire un instrument n’est pas en soi grammatical, mais signifierait « fabriquer un instrument ». Quand le complément direct est le mot instrument, on peut utiliser uniquement le verbe jouer de.
La différence essentielle avec jouer de est que le verbe faire se construit avec un complément direct. Dans faire du piano, le GN du piano est le complément de verbe direct du verbe faire, et le mot du est l’article indéfini massif. Comparer les constructions aux exemples ci-dessus :
faire + du piano → faire du piano
faire + de la trompette → faire de la trompette
La différence entre les deux constructions devient apparente quand le verbe est à la forme négative. Dans le cas du verbe faire, l’article indéfini massif passe à la forme de. En revanche, comme le verbe jouer de a un complément prépositionnel, il n’y a aucune modification à la forme négative. On dit donc je ne sais plus jouer de la flute (en osaa enää soittaa huilua) et non pas je ne sais plus jouer *de flute, puisque le nom flute n’est pas un complément de verbe direct. Comparer également :
Je ne fais plus de violon. Mais :
Je ne joue plus du violon.
Il ne fait plus de piano. Mais :
Il ne joue plus du piano.
Elle n’avait plus fait de trompette depuis longtemps. Mais :
Elle n’avait plus joué de la trompette depuis longtemps.
Du fait des fortes similitudes évoquées ci-dessus entre les constructions telles que jouer du piano et faire du piano, il règne un flottement (notable) à ce sujet chez les francophones eux-mêmes. On trouve par exemple sur Internet de nombreuses occurrences avec de négatif après jouer :
Je ne joue plus de piano depuis des années et je regrette de n’avoir jamais rien mémorisé de manière durable. ■ Pépé ne jouait plus de violon, son arthrose désormais lui interdisait tout effort.
Il est probable que la plupart des utilisateurs interprètent les deux formes comme une seule et même construction (verbe avec CVD), ce qui est encore renforcé par le fait qu’on peut dire jouer un rôle, jouer Hamlet, jouer une carte etc. L’analogie s’étend aussi couramment à jouer à qch, puisqu’on trouve sur internet des phrases comme je joue du tennis, je joue du foot (alors qu’en principe on devrait dire soit je joue au foot, soit je fais du foot). La construction de jouer de avec un complément désignant un instrument de musique tend donc à évoluer, au moins dans l’usage courant et a tendance à s’aligner sur celle de faire du/de la, et dans ce cas la négation transforme l’article en de.
Dans le code écrit strict, toutefois, la construction de jouer dans ce sens reste inchangée : le verbe se construit avec un complément prépositionnel (préposition de) quand on parle d’un instrument (je joue du basson, elle joue de la flute etc., forme négative tu ne joues plus du clavecin), et c’est particulièrement vrai devant les autres déterminants que l’article.
Quand le complément du verbe jouer désigne de la musique et non plus un instrument, le verbe a un complément de verbe direct :
jour des notes, jouer des gammes, jouer des accords
jouer du Bartók, jouer une symphonie, jouer une sonate
Dans ce sens-là, on ne peut pas non plus utiliser le verbe faire. Faire une sonate serait grammatical, mais signifierait « composer une sonate ».
Le résumé suivant présente différents exemples qui expliquent pourquoi les apprenants de français langue étrangère (et les francophones) peuvent facilement confondre les différentes constructions :
faire du piano (du = article indéfini massif)
jouer du piano (du = formecontracte de+le)
jouer du Ravel (du = article indéfini massif)
Les apprenants de français langue étrangère (de toutes origines linguistiques) sont souvent embarrassés quand il s’agit d’utiliser l’expression parler + nom de langue, étant donné qu’en français on peut dire indifféremment parler anglais ou parler l’anglais. Les deux expressions sont-elles parfaitement synonymes ? Et si non, quelle est la différence entre la version avec article et celle sans article ?
En principe, les deux expressions ne sont pas entièrement équivalentes :
On pourrait ainsi imaginer quelqu’un qui s’amuse à parler français (en imitant le français) sans savoir parler le français (sans avoir étudié ou appris cette langue). Inversement, quelqu’un pourrait dire :
Je sais parler le français, mais je préfère parler anglais avec vous.
Osaan kyllä ranskaa, mutta puhun mieluummin englantia teidän kanssanne.
On ne dirait pas :
Je sais parler le français, mais je préfère *parler l’anglais avec vous.
Osaan kyllä ranskaa, mutta *osaan mieluummin englantia teidän kanssanne.
Toutefois, en finnois, puhua ranskaa a les deux sens (puhua et osata), et la traduction finnoise n’aide donc pas toujours à savoir laquelle des deux formes utiliser :
Puhutko (= Osaatko) sinä ranskaa ? Est-ce que tu parles le français ?
He puhuvat keskenään ranskaa. Ils parlent français entre eux.
Deuxième problème : en français, dans la langue courante, parler français (sans article) a également les deux sens :
(a) Est-ce que tu parles français ? Puhutko (= Osaatko) sinä ranskaa?
(b) Ils parlent français entre eux. He puhuvat keskenään ranskaa.
Normalement, si on voulait être très exact, on aurait dû dire dans l’exemple (a) : Est-ce que tu parles le français ? Mais dans la langue courante, il est tout à fait admis et normal de dire de cette façon, sans l’article. Donc, selon les cas, la construction parler + article ø + langue peut correspondre à puhua jtak kieltä ou à osata jtak kieltä.
On peut donc utiliser la construction avec article zéro (parler espagnol, parler finnois etc.) pour dire à la fois puhua espanjaa, puhua suomea et osata espanjaa, osata suomea. En revanche, on ne peut pas utiliser la construction avec article défini parler le + langue dans les deux cas. Cette construction s’utilise seulement quand on veut indiquer que quelqu’un sait parler ou non une langue (finnois osata) et ne peut pas s’utiliser pour décrire la « production de paroles » dans une langue. Si on entend deux étrangers parler et qu’on demande à quelqu’un quelle langue ils parlent, il faudra répondre avec la forme sans article :
Quelle langue parlent ces gens ? C’est du russe ? Mitä kieltä nuo ihmiset puhuvat? Onko se venäjää? – Non, ils parlent ukrainien. Ei, vaan he puhuvat ukrainaa.
et non pas Ils parlent l’ukrainien, qui serait une réponse illogique, tout comme il serait illogique de dire en finnois : Mitä kieltä nuo ihmiset puhuvat? – He osaavat venäjää.
On peut donc dire que la forme parler français avec article zéro peut s’employer dans tous les cas (et il vaut donc mieux employer celle-là en cas de doute), tandis que la forme parler le français est d’un emploi plus limité.
Dernier point très important à noter : la possibilité d’utiliser le nom désignant la langue (français, finnois, suédois etc.) sans article ne concerne que le complément du verbe parler ! Avec d’autres verbes, il n’y a pas de possibilité de choix, l’article est obligatoire. On peut donc dire :
Elle parle le français ou Elle parle français.
Elle parle l’allemand ou Elle parle allemand.
mais on ne peut pas dire (erreurs fréquemment constatées chez les finnophones) :
**Elle veut étudier espagnol. uniquement : Elle veut étudier l’espagnol.
**J’ai appris français à l’école. uniquement :J’ai appris le français à l’école.
**Il ne comprend pas allemand.uniquement : Il ne comprend pas l’allemand.
**Elle enseigne italien depuis dix ans. uniquement : Elle enseigne l’italien depuis dix ans.
En français, le mot parent désigne à la fois l’un des deux parents qu’a tout être humain, le père ou la mère, en finnois vanhempi, et au sens plus large, une personne quelconque de la parenté (oncle, tante, cousin etc.), en finnois sukulainen. En français, on utilise donc un seul et même mot là où d’autres langues (finnois, italien, espagnol, anglais etc.) en utilisent deux différents.
Ce qui est également embarrassant pour les apprenants de français langue étrangère, c’est qu’au pluriel, le groupe nominal avec article défini les parents désigne toujours les père et mère d’une personne, puisqu’il s’agit de parents « définis » implicitement. Le sens à donner au mot parent dépend le plus souvent du déterminant utilisé.
Parents avec un déterminant défini désigne généralementt le père et la mère, en finnois vanhemmat :
Il s’entend bien avec ses parents. Hän tulee hyvin toimeen vanhempiensa kanssa. ■ J’ai rencontré les parents de Clémentine. Tapasin Clémentinen vanhemmat.
Parents avec un déterminant indéfini désigne les gens de la parenté, en finnois sukulaiset. Si on veut marquer le possesseur, il faut utiliser la construction à pronom personnel :
Au mariage, on n’avait invité que des parents. Häihin kutsuttiin vain sukulaisia.
Nous sommes en vacances chez des parents à nous. Lomailemme sukulaistemme luona.
Cependant, cette équivalence n’est pas automatique : même avec un déterminant indéfini, le mot parent peut désigner des parents dans le sens de père ou mère :
un parent isolé yksinhuoltaja ■ À la réunion, le professeur a rencontré des parents inquiets de l’avenir de l’école. ■ Un proviseur-adjoint agressé par un parent [titre de journal]
Il faut donc, comme toujours dans le cas de l’article, interpréter le sens du GN en fonction du contexte. Cependant, les finnophones peuvent retenir la règle suivante (tout en sachant qu’elle ne couvre pas tous les cas d’emploi) :
He ovat vanhempani. = Ce sont mes parents.
He ovat sukulaisiani. = Ce sont des parents à moi/Ce sont des gens de ma famille.
Il faut donc éviter de présenter par exemple des cousins en disant « Ce sont mes parents ».
✋ Ne pas traduire non plus le mot sukulaiset par le faux-ami inspiré de l’anglais relatives : en français, les relatives signifie « les propositions relatives », finnois relatiivilauseet.
Noël et Pâques, sont deux fêtes religieuses importantes, mais ce sont aussi, et plus encore, deux repères saisonniers et météorologiques très importants dans le calendrier, le ciel et le climat finlandais. Le nom de ces fêtes est donc utilisé ou mentionné fréquemment et tout au long de l’année. L’utilisation de l’article (et des prépositions) devant ces deux noms pose souvent des problèmes aux apprenants de français.
Noël s’emploie normalement sans article s’il n’est pas déterminé d’une façon quelconque (par un déterminant, un adjectif, un complément etc.) :
Il vient à Noël. ■ Noël a été très tranquille. [article zéro, Noël sans complément] ■ Où est-ce que vous allez passer Noël cette année ? ■ Nous partons en Laponie pour Noël.
Il ne faut pas utiliser d’article dans ce cas ! Les tournures *Je vais passer le Noël chez moi ou Je pars chez mes parents *pour le Noël sont des erreurs fréquemment constatées chez les finnophones. Mais le mot Noël peut s’utiliser facilement avec un article quand il est complété par un adjectif ou défini par un déterminant particulier :
Je vous souhaite un joyeux Noël. [article indéfini, caractérisation] ■ Nous avons passé un Noël très sympathique chez des amis. [article indéfini, caractérisation] ■ Nous avons absolument besoin de votre aide pour transformer le Noël de ces enfants défavorisés en un jour heureux et magique. [article défini, Noël défini par le GN de ces enfants]
Le mot Pâques était autrefois précédé d’un article. On dit encore aujourd’hui fréquemment Je vous souhaite de joyeuses Pâques, avec article indéfini. Mais quand on l’emploie seul (sans adjectif, par exemple après Pâques), en français moderne on n’utilise plus d’article.
Le problème est que, d’un côté, Pâques a la forme et le comportement d’un nom propre comme Noël, sans genre ni nombre apparent et utilisé sans article. On dit ainsi à Pâques, exactement comme à Noël, et le mot Pâques est sans genre : Pâques a été très froid. De l’autre côté, l’expression Joyeuses Pâques utilisée sur les cartes de vœux donne conscience aux usagers que le mot a (ou avait) un genre et un nombre. Ce féminin pluriel ne se voit que dans l’expression Joyeuses Pâques qui est devenue quasiment figée : en effet on n’utilise jamais d’autre adjectif. *Bonnes Pâques !, formule typique utilisée par les finnophones sur le modèle de Hyvää pääsiäistä, ne s’emploie pas en français.
Le mot Pâques semble donc se comporter comme Noël mais, malgré cela, en même temps ne pas pouvoir être utilisé avec un article ou un adjectif quelconque, contrairement à Noël. Face à cette contradiction, les usagers sont embarrassés. C’est pourquoi, quand il faut utiliser un article ou un adjectif, on utilise habituellement la circonlocution la fête de Pâques / le weekend de Pâques, le weekend pascal. Comparer avec les exemples sur Noël :
Il vient à Pâques. [article zéro dans la construction prépositionnelle] ■ Pâques a été très froid. [article zéro, Pâques sans complément] ou : ■ Le weekend de Pâques a été très froid. ■ Je vous souhaite une joyeuse fête de Pâques / de joyeuses Pâques. ■ Nous avons passé une fête de Pâques très sympathique chez des amis. [article indéfini, caractérisation]
Il y a des cas où on utilise des déterminants définis (faire ses Pâques, expression devenue démodée), mais dans le doute, si on veut utiliser un article ou un adjectif, il vaut mieux utiliser la forme la fête de Pâques / une fête de Pâques.
Remarque : tout ceci ne concerne pas la Pâque juive (notamment dans les citations bibliques) ni orthodoxe, qui est un nom féminin singulier et qui s’utilise comme un nom de fête normal : à la Pâque juive, avant la Pâque orthodoxe etc.
25. L’article – difficultés. Mise à jour 16.9.2024