Dans sa forme de base (correspondant au finnois ei accompagnant un verbe à la forme négative), la négation s’exprime à l’aide de deux mots (considérés comme des adverbes) négatifs, qui « encadrent » le verbe : un premier adverbe négatif ne, qui se place entre le sujet du verbe et le verbe, et un deuxième mot négatif qui se place après le verbe :
ne verbe pas ei
ne verbe plus ei enää
ne verbe jamais ei koskaan
ne verbe nulle part ei missään
ne verbe pas encore ei vielä
ne verbe guère ei kovinkaan
Dans le français parlé, on n’emploie presque jamais l’adverbe négatif ne. La négation s’exprime seulement avec pas, plus, rien, jamais etc.
La négation ne…guère s’utilise surtout dans le code écrit . Elle peut toujours être remplacée par exemple par pas beaucoup.
Il peut être utile de se rappeler le contraire des adverbes négatifs :
ne … plus | encore vielä, toujours edelleen |
ne … jamais | toujours, souvent, quelquefois, parfois, déjà |
ne … pas encore | déjà |
ne … nulle part | partout, quelque part |
ne … guère | beaucoup |
Je ne suis jamais allé au Canada. ≠ Je suis déjà allé au Canada. ■ Tu n’as plus faim ? ≠ Tu as encore faim ? ■ On n’en trouve plus nulle part. ≠ On en trouve encore partout./ On en trouve encore quelque part. ■ Il ne fait pas encore très chaud. ≠ Il fait déjà très chaud.
Le mot ne se place avant le verbe, et avant les pronoms faibles compléments du verbe qui précèdent le verbe ; aux temps composés, le deuxième mot négatif (pas, jamais etc.) se place après l’auxiliaire, selon le schéma suivant :
ne (pronom) verbe pas : Je ne les connais pas.
ne (pronom) auxiliaire pas participe passé : Je ne leur en ai pas parlé.
Aujourd’hui, il fait beau. → Aujourd’hui, il ne fait pas beau.
La Finlande avait obtenu une médaille d’or. → La Finlande n’avait pas obtenu de médaille d’or.
Je leur en ai parlé. → Je ne leur en ai plus parlé.
Tu aurais dû le lui dire. → Tu n’aurais jamais dû le lui dire.
Ils me l’avaient promis. → Ils ne me l’avaient pas promis.
Elle boit du lait. → Elle ne boit jamais de lait.
Dans les formes interrogatives avec inversion du sujet, l’adverbe ne ne change pas de place et reste devant le verbe :
Tu n’aurais pas dû le lui dire.
N’aurais-tu pas dû le leur dire ?
Dans une phrase négative, l’article indéfini devant un nom en fonction de complément de verbe direct peut passer à la forme de (La Finlande n’a pas obtenu de médaille d’or, Il ne boit pas de lait).
Personne, nul (ei kukaan) et rien (ei mikään) sont des pronoms indéfinis « semi-négatifs » qu’on utilise avec l’adverbe négatif ne (sauf dans le français parlé), mais sans l’adverbe pas. Le pronom nul est un synonyme de personne utilisé surtout dans le code écrit ou dans certaines expressions. Ces pronoms sont invariables :
Personne n’a parlé. ■ Je n’ai entendu personne. ■ Rien ne le passionne autant que le golf. ■ Le médecin n’a rien trouvé d’anormal. ■ Nul ne saurait dire comment serait la Finlande si elle était restée suédoise. ■ À l’impossible nul n’est tenu. Tyhjästä on paha nyhjäistä (mot à mot : « Ketään ei voi pakottaa tekemään mahdottomia. »).
Aucun et nul peuvent être utilisés comme déterminants. Ils s’accordent alors en genre (masculin ou féminin), mais sont toujours au singulier. Le déterminant nul est un synonyme d’aucun utilisé surtout dans le code écrit :
Aucun candidat n’a obtenu le nombre de points suffisant. ■ Passé ce délai, il n’y a aucune possibilité de se faire rembourser le voyage. ■ Le laboratoire n’a trouvé nulle trace de phtalates. ■ Nul espoir n’est permis. Ei ole enää mitään toivoa.
Aucun peut aussi être utilisé comme pronom représentant (il renvoie à un antécédent) et s’accorde alors en genre (masculin ou féminin), mais il est toujours au singulier :
Il a essayé plusieurs paires de chaussures, mais aucune ne lui plaisait. ■ J’ai vérifié les réponses. Aucune n’était juste.
À noter:
On peut utiliser ensemble différents mots négatifs comme plus, nulle part, jamais, rien, personne etc., mais dans ce cas, on ne peut pas utiliser en même temps le mot pas (sauf dans ne … pas encore, car encore n’a pas un sens négatif). Les mots négatifs se combinent généralement dans l’ordre suivant :
ne … (pas/plus) encore /jamais rien/personne nulle part
Je ne l’ai plus vu nulle part.
On n’a encore jamais vu ça nulle part.
Je ne lui parlerai plus jamais.
Il ne fait pas encore trop chaud.
Je ne l’ai plus vu nulle part.
On n’a encore jamais vu ça nulle part.
Je ne lui parlerai plus jamais.
Je n’ai plus rien entendu.
Il n’a encore rencontré personne.
Personne n’a rien fait pour l’aider.
Il n’y en a plus aucune nulle part.
Rien ne sera plus jamais comme avant.
Je n’avais encore jamais vu ça chez personne.
Personne ne l’a plus jamais vu nulle part.
Je n’offrirai plus jamais rien à personne.
Ce ne sera plus jamais possible pour personne nulle part.
Cela ne sera plus jamais la même chose pour aucun d’entre nous.
Quand on utilise un ou plusieurs des mots négatifs mentionnés ci-dessus (plus, personne, jamais, nulle part, rien, aucun etc.), il faut faire attention à ne pas utiliser en même temps l’adverbe pas. Si on les emploie ensemble, cela « annule » (mitätöi) les deux négations et peut donner à l’énoncé un sens affirmatif comique ou inattendu :
*Je n’ai pas vu personne au marché. [= J’ai vu quelqu’un.] ■ *Aucun des participants n’a pas réagi. [= Tous les participants ont réagi.] ■ *Il n’a pas trouvé aucun exemple. [= Il a trouvé un exemple.]
C’est une erreur assez fréquente chez les apprenants de français langue étrangère, surtout quand les mots négatifs sont éloignés les uns des autres dans des phrases longues, comme dans l’exemple suivant:
Aucun des seize passagers de l’avion qui s’est écrasé avant-hier en début de soirée à proximité de l’aéroport, après un décollage tout à fait normal, n’a échappé à la mort.
Les francophones eux-mêmes ne sont pas à l’abri de ces erreurs, comme le prouve cette phrase extraite d’un grand quotidien en ligne :
En conséquence, les débats sont soumis au régime de la publicité restreinte : cela signifie que ni le public, ni la presse ne peuvent *pas assister aux audiences. [forme correcte : ne peuvent assister]
L’emploi de la double négation est le plus souvent accidentel chez les locuteurs de français langue étrangère ou francophones, mais on peut parfois utiliser la double négation volontairement, par exemple dans l’expression c(e n)’est pas rien, ou pour corriger une assertion ; à une personne qui affirme qu’elle n’a fait aucune erreur dans un calcul, on pourrait par exemple dire, si on constate qu’elle s’est quand même trompée (en insistant sur pas) :
Désolé de te le dire, mais tu n’as pas commis aucune erreur. =
En fait, tu as quand même fait une erreur.
Quand la négation porte sur un infinitif, les deux mots négatifs se placent ensemble devant l’infinitif :
Ne pas révéler la vérité pour l’instant serait peut-être la solution de sagesse. ■ Moi, je lui conseillerais de ne pas accepter. ■ Je lui ai promis de ne pas le dire. ■ Pourquoi ne pas le leur permettre ? ■ Il a réussi à ne pas être élu. Hänellä oli onnea olla tulematta valituksi. ■ J’ai décidé de ne plus aller nulle part cet été. ■ Il serait bon de ne pas l’en informer tout de suite.
Dans le français parlé, ne n’est pas utilisé :
J’ai promis de pas le dire. ■ Il aurait mieux valu rien dire. Etc.
Cependant, les pronoms indéfinis personne et rien ne sont pas ensemble devant le verbe. Ils se mettent à leur place normale après le verbe, sauf rien quand il est complément direct du verbe, et qui dans cas reste devant le verbe :
Essaye de ne penser à rien. ■ Il serait bon de n’en informer personne. ■ Il aurait mieux valu ne rien dire.
Comparer la place de encore dans les deux exemples suivants :
(a) Il serait bon de ne pas encore l’en informer.
(b) Il serait bon de n’en informer encore personne.
Dans la phrase (a), ne pas encore forme un groupe et se place devant l’infinitif. Dans la phrase (b), le mot personne doit se placer derrière le verbe et ne peut pas former un groupe devant l’infinitif. C’est pourquoi encore occupe la place qu’il aurait dans une phrase normale (Nous n’en informerons encore personne).
Quand on utilise un infinitif, l’ordre des mots négatifs affecte le sens. Comparer :
Moi, je ne lui conseillerais pas d’accepter. Minä en neuvoisi häntä suostumaan. ■ Moi, je lui conseillerais de ne pas accepter. Minä neuvoisin häntä olemaan suostumatta. ■ Je n’ai pas promis de le dire. En luvannut kertoa sitä. ■ J’ai promis de ne pas le dire. Lupasin olla kertomatta sitä. ■ On ne peut rien faire. Ei voi tehdä mitään. ■ On peut ne rien faire. Voidaan olla tekemättä mitään (katsoa sivusta).
On peut utiliser l’infinitif négatif après le verbe pouvoir à la forme négative, pour exprimer une sorte d’obligation morale (en finnois ei voi olla tekemättä, sanomatta etc.) :
Tu ne peux pas ne pas aller à ce congrès. ■ On ne peut pas ne pas aimer le sauna. ■ On ne peut pas ne pas être attendri par un tout petit bébé. ■ Tu ne peux pas ne pas être contente quand tu marches dans la rue le matin vers ton métro !
Le finnois ei voi olla … -mAttA peut aussi se traduire par la locution ne pas pouvoir s’empêcher de + infinitif. Cette construction signifie plutôt une impossibilité physique (ei mahda mitään sille, että) :
Je n’ai pas pu m’empêcher de rire. ■ On ne peut pas s’empêcher d’aimer cet enfant. Ei voi olla pitämättä siitä lapsesta [kaikesta huolimatta].
Dans les phrases sans verbe (par exemple dans des réponses), on n’utilise pas ne :
Qui vient cueillir des fraises ? – Pas moi. ■ J’ai déjà eu mon permis, mais mon frère pas encore. ■ Je veux bien encore aller en France en voiture, mais plus jamais avec toi. ■ Est-ce que le ferry est à quai ? – Pas encore. ■ Où tu vas ? – Nulle part, je vais me promener.
Quand la proposition sans verbe suit une proposition à la forme affirmative, on utilise de préférence la forme non (a) ; dans le français parlé (style assez familier), on utilise pas (b) :
(a) Vous, vous avez promis de les aider à fuir, mais moi, non. ■ Nous aimons bien passer les vacances à la montagne, eux non.
(b) Vous, vous avez promis de les aider à déménager, mais moi pas. ■ On aime bien passer les vacances à la montagne, eux pas.
Dans le code écrit, les verbes savoir, pouvoir, oser, cesser sont parfois employés avec ne seul (sans pas). Cela se limite à quelques tournures plus ou moins figées. Il n’y a pas de différence de sens, seulement de style :
Je n’ose songer aux conséquences. ■ Je ne puis répondre à cette question. ■ Elle ne cesse d’y penser. ■ Je ne saurais dire. ■ Il ne put s’empêcher de faire une remarque.
Dans ce genre d’emploi, savoir signifie plutôt « être capable de » (voir aussi les constructions interrogatives indirectes je ne sais que faire) :
Je ne saurais accepter. En voi mitenkään suostua. ■ Je ne saurais trop vous recommander la prudence. Kehotan teitä äärimmäiseen varovaisuuteen.
Dans le code écrit, l’adverbe négatif pas est également supprimé dans les questions rhétoriques (a) ou dans les phrases exclamatives introduites par que dans le sens de si seulement (b) :
(a) Qui n’en aurait envie ? Kukapa ei sitä haluaisi? ■ Qui n’en conviendrait ? Kukapa ei olisi samaa mieltä?
(b) Que ne l’avez-vous dit plus tôt ! Kunpa olisitte sanonut sen aikaisemmin! ■ Que n’y ai-je pensé plus tôt ! Kunpa olisin ajatellut sitä aikaisemmin!
Dans le style soutenu, on peut omettre pas dans les propositions relatives dépendant d’une principale interrogative ou négative :
Il n’y a rien qu’il ne connaisse. Ei ole olemassa mitään sellaista, mitä hän ei tuntisi. ■ Y a-t-il des gens avec qui elle ne s’entende ? Onko olemassa ihmisiä, joiden kanssa hän ei tulisi toimeen? ■ A-t-on jamais vu rien de plus beau ? Onko koskaan nähty mitään kauniimpaa?
L’absence de pas est possible seulement après une principale où la question est formée avec inversion du sujet. Si la question est posée avec est-ce que ou avec l’ordre des mots normal (interrogation intonative), il faut exprimer pas :
Est-ce qu’il y a des gens avec qui elle ne s’entend pas ?■ Il y a des gens avec qui elle ne s’entend pas ?
Dans certaines constructions exprimant la durée (notamment de+complément de temps), on utilise ne seul, surtout quand ces compléments se trouvent avant le verbe. L’absence de pas est due au fait que ces compléments sont équivalents à « jamais » (ne utilisé conjointement avec ces compléments équivaut ainsi à ne… jamais) :
De ma vie je n’oublierai ce spectacle enchanteur. En koskaan eläessäni unohda sitä ihastuttavaa näkyä. ■ De mémoire d’homme on n’avait vu un si bel automne. Näin kaunista syksyä ei oltu nähty miesmuistiin. ■ Je n’avais jamais tant ri de ma vie. En ollut eläessäni niin paljon nauranut. ■ De mémoire de riverain, on n’avait vu pareille crue. Joenvarren asukkaat eivät muista nähneensä vastaavanlaista tulvaa.
C’est aussi le cas dans des constructions avec voilà ou cela fait/cela faisait + complément de temps :
Voilà deux ans je n’ai entendu parler de lui. En ole kuullut hänestä kahteen vuoteen. ■ Cela faisait bien des années que nous ne l’avions vu. Oli kulunut useita vuosia siitä, kun olimme nähneet hänet viimeksi.
On emploie également ne seul dans certaines expressions plus ou moins figées :
Qu’à cela ne tienne ! Siitä vaan! ■ Il n’empêche que c’est vrai. Oli miten oli, se on totta. ■ Je n’ai que faire de ses opinions. En välitän hänen mielipiteistään. ■ Nous n’avons que faire de vos remarques. Meitä ei kiinnosta huomautuksenne. ■ N’ayez crainte ! Olkaa huoleti.
De l’expression il n’empêche que est dérivée la locution adverbiale n’empêche (sans il, et parfois développée avec que), très courante dans le français parlé et qui correspond à silti :
Je sais bien que tu es très pressé, n’empêche que tu aurais pu m’écrire un mot. Tiedän, että olet hyvin kiireinen, mutta olisit silti voinut kirjoittaa minulle pari sanaa. ■ N’empêche, si vous m’aviez prévenu, cela m’aurait épargné le déplacement. Silti jos olisitte ilmoittaneet minulle, olisin säästynyt ylimääräiseltä matkalta.
Comme mot-phrase négatif, le mot non est utilisé comme substitut de phrase dans la réponse négative :
Est-ce que M. Alengry est là ? – Non, il est en voyage. ■ Tu as tondu le gazon ? – Non. ■ Tu veux une glace ? – Non, merci.
Non plus est le contraire d’aussi. Non plus s’utilise conjointement avec ne… pas :
Je n’irai pas non plus au concert. En minäkään mene konserttiin. / En mene myöskään konserttiin. ■ La clé n’était pas non plus dans mon sac. ■ Eux non plus ne vont plus en vacances en Turquie. Hekään eivät enää vietä lomaansa Turkissa.
Non plus se place assez librement dans la phrase sur l’élément qu’on veut nier :
Cette année non plus, il n’a pas beaucoup plu. ■ Ça n’a pas été une bonne solution pour eux non plus.
Dans les phrases sans verbe, avec non plus, on n’utilise pas l’adverbe pas :
Il n’est pas parti en vacances, et ses enfants non plus. ■ Tu ne veux pas partir ? Moi non plus.
Avec non ou non pas, on peut faire porter la négation sur un élément précis de la phrase, généralement quand on oppose une assertion ou une idée à une autre. Non [pas] exprime dans ce cas-là à peu près la même idée que le finnois ei niinkään. On peut utiliser soit non pas, soit non tout seul (dans le doute, à l’écrit, le plus simple est d’utiliser toujours la forme pleine non pas) :
Il est parti, non [pas] parce qu’il en avait assez de la société, mais parce qu’il voulait en créer une. ■ Ce que tu as entendu était du lituanien, et non [pas] du polonais. ■ Mais n’oublions pas que « intolérant au lait » signifie « ne pas digérer le lait », et non pas « ne pas tolérer que les autres en boivent » !…
On utilise la forme longue non pas systématiquement devant un infinitif, et très souvent aussi devant un adjectif :
Il aurait fallu non pas rouler toute la nuit, mais s’arrêter un peu et continuer à l’aube. ■ J’étais non pas déçu, mais plutôt surpris.
Dans le français parlé, non pas et non sont remplacés par pas :
Il est parti, pas parce qu’il en avait assez de la société, mais parce qu’il voulait en créer une à lui. ■ Ce que tu as entendu était du lituanien, et pas du polonais.
S’il n’y a pas de verbe, on peut utiliser seulement la forme pas (dans le code écrit et dans le français parlé) :
Pas aujourd’hui. ■ Pas tout seul. ■ Pas avant ce soir. ■ Comment ça va ? – Pas très bien.
Les adverbes négatifs non et pas peuvent fonctionner comme négation devant des adjectifs ou des participes. Dans le code écrit, on utilise pas devant un adjectif caractérisant normal (beau, grand etc.) et non devant un participe ou un adjectif à valeur verbale (en ‑able, ‑ible etc.) :
Livres pas chers ■ eau non potable ■ des légumes non traités torjunta-aineettomia vihanneksia ■ les pays non alignés sitoutumattomat maat ■ service non compris ■ TVA non comprise ■ Sur le site, il y a plein de petits films pas longs à télécharger.
Dans le français parlé, on peut également utiliser pas devant un participe :
du linge pas lavé pesemätön pyykki ■ Un chèque pas signé ne servait à rien. ■ Ce restaurant, c’était addition salée et service pas compris !
On peut aussi former des mots composés avec non devant un nom, en ajoutant un trait d’union :
le non-alignement, les non-voyants ■ la non-violence, un pacte de non-agression
Dans le code écrit, on utilise avec une grande souplesse des formes nominales « négatives » du verbe avec non. Dans ce cas, il est fréquent qu’on omette le trait d’union, mais l’usage est flottant à ce sujet et on trouve de nombreuses graphies avec trait d’union :
la non observation d’un règlement ■ le non respect des normes environnementales ■ La non adhésion de ce pays au traité serait une catastrophe.
La préposition sans a un sens négatif. Le groupe sans + verbe se comporte souvent comme une phrase négative. On n’utilise cependant pas l’adverbe ne :
Tu ne peux pas rester là sans rien faire. ■ Il retient une quantité incroyable de numéros de téléphone sans jamais se tromper. ■ Ne pars pas faire du ski hors-piste sans prévenir personne.
On peut aussi utiliser sans dans des contextes « doublement négatifs » (= affirmatifs), par litote :
Cela n’a pas été sans mal. Se oli melko hankalaa. ■ Ils ont réussi à éteindre l’incendie, non sans difficulté. He onnistuivat vaivoin sammuttamaan tulipalon. ■ Les syndicats ont accepté le plan de redressement, non sans critiquer la direction. Ammattijärjestöt hyväksyivät saneerausohjelman arvostellen samalla johtoa.
Utilisé après un premier mot négatif comme ne … pas, ne … plus, ne …personne etc., l’adverbe ni a le même sens que et ne… pas (eikä) , et on peut aussi l’utiliser après un élément de sens négatif introduit par sans:
Je ne peux pas partir : je n’ai pas de passeport ni de visa. ■ À cette heure-ci, il n’y a plus de bus ni de métro. ■ Je n’ai pas acheté de glace ni de limonade. ■ J’étais sorti sans argent ni papiers. ■ On va prendre de vraies vacances : on part sans les enfants ni le chien.
On ne peut pas relier deux groupes nominaux en fonction de sujet avec un seul ni (sauf dans le style soutenu), dans ce cas-là, il faut utiliser ni… ni….
Quand il est répété, ni a le même sens que ne…pas … et ne …pas, mais est une négation plus forte. Quand on utilise ni… ni… il faut en plus obligatoirement utiliser le mot ne devant le verbe :
Ni ses parents ni ses amis n’ont réussi à le faire changer d’avis. ■ Ni son frère ni ses parents n’étaient au courant de son mariage. ■ À cette heure-ci, il n’y a plus ni bus ni métro. ■ Il n’avait dit à personne qu’il s’était marié : ni à ses parents ni à sa sœur.
Quand ni est répété devant un complément direct, il entraine l’utilisation d’un article zéro :
Je ne peux pas partir : je n’ai ni passeport ni visa.
Dans le code écrit ou le style soutenu, les règles concernant ni sont assez compliquées. Voir ci-dessous.
La construction ne… que a le même sens que seulement, en finnois vain, ainoastaan (voir les différentes manières de traduire l’adverbe vain). Bien que cette construction soit formée avec l’adverbe négatif ne, elle n’a pas un sens négatif. Elle peut être utilisée avec un complément de verbe ou un complément de phrase, mais pas avec un GN sujet. Comme ne… que n’a pas un sens négatif, l’article indéfini n’est pas modifié devant le complément de verbe direct :
Nous n’avons trouvé que des russules et des lactaires, pas de cèpes. Löysimme vain haperoita ja rouskuja, emme tatteja. ■ Cette année, je ne fais que du français, l’an prochain je ferai aussi de l’anglais. ■ Ils n’habitent qu’à 20 mètres du lac.
Comme ne… que n’a pas un sens négatif, on peut ajouter pas dans la phrase, pour exprimer l’idée de « pas seulement, pas uniquement » (finnois ei vain, ei pelkästään) :
Au petit déjeuner, les Français ne mangent pas que des croissants. ■ Il n’y pas que toi qui aimes le chocolat, laisses-en aux autres. ■ La crise n’a pas eu que des effets négatifs.
Dans ce cas, l’article indéfini devant CVD ne devient pas de, car la négation ne porte pas sur toute la phrase, elle est « partielle » :
Au petit déjeuner, les Français ne mangent pas que des croissants. [= Ils mangent aussi autre chose.]
Malgré les apparences, ne … que, qui semble plus compliqué que seulement aux apprenants de français langue étrangère, est beaucoup plus fréquent que seulement. En effet, dans le français parlé, l’adverbe négatif ne de ne… que n’est pas exprimé (comme dans le cas de ne pas, voir ci-dessus) et on utilise seulement le mot que. Comme l’e de que se prononce rarement, en français l’idée de « seulement » se réduit à une simple consonne et se dit /k/
, qui peut devenir sonore (/g/
) devant une consonne sonore (assimilation de sonorité) :
Tu travailles ? – Je fais que ça ! /ʃfeksa/
Teetkö työtä? – En tee muuta! ■ Il boit que de l’eau. /ibwagdɶlo/
Hän juo pelkästään vettä. ■ Ça a que des avantages. /saagdezavɑ̃taʒ/
Siitä on pelkästään hyötyä.
De la même manière, la construction il n’y a pas que… se réduit à /japak/
:
Il n’y a pas que toi /japaktwa/
qui saches faire la cuisine. ■ Il n’y a pas que des /japagdez/
avantages.
Normalement, ne… que ne peut pas être utilisé sans verbe, car l’adverbe ne doit s’appuyer sur un verbe. Dans le code écrit, on utilise alors l’adverbe seulement (ou uniquement) :
Vous prenez du sucre et du lait dans votre café ? – Seulement du sucre. ■ Cette solution n’a aucun inconvénient, uniquement des avantages.
Cependant, dans le français parlé, comme on n’utilise pas ne, l’absence de verbe n’empêche pas l’utilisation de que tout seul :
Tu prends du sucre et du lait dans ton café ? – Que du sucre. ■ Cette solution n’a aucun inconvénient, que des avantages. ■ Qu’est-ce qu’il a dit de cette nouvelle recette ? — Que du bien !
Dans cette construction très courante à l’oral, ne… que sert à exprimer un conseil, proposer une solution etc. :
Il n’y a qu’à prendre les trains de banlieue bondés de Mumbai pour apercevoir des graffitis appelant à la résistance à la mondialisation. ■ Inutile de retaper tout le texte, vous n’avez qu’à le numériser avec votre smartphone. ■ Si tu n’as pas envie d’attendre le bus, tu n’as qu’à prendre un taxi. Jos ei huvita odottaa bussia, mene [ihmeessä] taksilla. ■ Ce n’est pas la peine de pleurer, tn’avais qu’à mieux faire attention à tes affaires. Nyt ei itku enää auta, olisit pitänyt parempaa huolta tavaroistasi.
Dans le français parlé familier, ne n’est pas exprimé, et tu n’as qu’à suivi d’un infinitif se prononce couramment /taka/
(tu est généralement élidé sous la forme t’) :
Si t’as pas pu voir le film, c’est pas grave, t’as qu’à y aller la semaine prochaine, il passe encore tout le mois. ■ Cette fois, j’en ai assez, je pars ! – Eh bien, t’as qu’à partir. Nyt riitti! Minä lähden ! – Sen kun [lähdet]! ■ Si t’as rien de plus intelligent à dire, t’as qu’à te taire ! Jos et keksi ole sitten vaiti!
La construction il n’y a qu’à signifie « il suffit de ». Dans la langue courante, on supprime couramment l’indice de personne verbale il et on prononce /jaka/
:
Si les photos sont de travers, y à qu’a les redresser avec l’appli, c’est vraiment simple, y à qu’à régler un curseur. ■ Pour augmenter la consommation, il n’y a qu’à baisser les impôts. ■ Si on veut éviter les bouchons, y a qu’à pas partir si tôt.
Certains adverbes ou constructions idiomatiques liés à la négation sont source de difficultés pour les finnophones et sont présentés en détail ci-dessous :
Dans le français parlé, on n’emploie presque jamais l’adverbe négatif ne. La négation s’exprime seulement avec pas, ou un autre mot négatif comme plus, rien, jamais, etc. Comparer les exemples avec et sans ne :
Aujourd’hui, il ne fait pas beau. ■ La Finlande n’a pas obtenu de médaille d’or. ■ Tu n’aurais pas dû le lui dire. ■ Je n’ai pas mangé. ■ Ne bois pas trop de lait. ■ Tu ne le leur as pas promis. ■ Il n’y a pas d’autre solution. ■ Il n’a pas un mot. ■ Je n’ai rien compris. ■ Ils ne partent pas encore demain.
Aujourd’hui, il fait pas beau. ■ La Finlande a pas obtenu de médaille d’or. ■ Tu aurais pas dû le lui dire. ■ J’ai pas mangé. ■ Bois pas trop de lait. ■ Tu le leur as pas promis. ■ Il y a pas d’autre solution. ■ Il a pas dit un mot. ■ J’ai rien compris. ■ Ils partent pas encore demain.
À l’impératif, on utilise cependant relativement souvent ne, mais c’est très variable selon les locuteurs et les situations.
Quand, dans le français parlé, on forme une phrase négative sans utiliser ne, le sens de la phrase est parfaitement équivalent à celui de la phrase avec ne dans le code écrit. Il y cependant des expressions sans ne qui se sont figées ou lexicalisées dans le français parlé, et dans lesquelles on ne peut pas rétablir ne (par exemple pour en faire du « beau français écrit ») sans changer le sens de la phrase. Comparer :
Ce n’est pas vrai. Se ei ole totta. [= C’est faux.]
C’est pas vrai ! Ei voi olla totta! Ei oo totta! [Exprime l’étonnement, l’indignation, l’agacement].
C’est pas vrai ! II va encore falloir se lever à une heure débile à cause de la grève !
Ce n’est pas possible. Se ei ole mahdollista. [= C’est impossible].
C’est pas possible ! Älähän! Ei kai? [Exprime l’étonnement, l’incrédulité, ou la contrariété.]
Mais c’est pas possible ! Ce machin est de nouveau en panne !
L’expression pas mal est un exemple typique de construction négative qui s’est lexicalisée en adjectif de sens non négatif. On n’utilise donc pas ne devant le verbe, car les mots pas et mal forment ensemble une expression figée, qui n’est plus sentie comme négative; si on la commente, on utilise la forme affirmative :
Le film était pas mal. ■ Ton idée est pas mal, mais ça coutera cher. ■ C’était pas mal, ce restau, hein ? – Oui, c’était vraiment bien, et pas cher en plus. [L’erreur fréquente chez les apprenants de français langue étrangère serait de répondre : *Non, ce n’était pas mal.]
Selon le contexte, ces expressions sans ne peuvent aussi être tout simplement la variante dans le français parlé de la forme normale avec ne du code écrit. Dans le français parlé, c’est pas possible peut donc signifier soit « c’est impossible » soit « c’est incroyable/ c’est énervant ». Certaines expressions n’ont pas d’équivalent avec ne (ou l’équivalent affirmatif aurait un sens littéral comique) :
Ça casse rien. Ei ole häävi. [?Ça ne casse rien. ?Se ei riko mitään.]
De même, pas mal peut être la forme véritablement négative de mal. Comparer :
Il n’est pas mal de mettre parfois en avant ses avantages. Ei ole mitään pahaa siinä, että joskus korostaa omia hyviä puoliaan. ■ C’est pas mal de mettre parfois en avant ses avantages. Tuntuu ihan mukavalta välillä korostaa omia hyviä puoliaan.
Malgré son caractère figé, l’expression pas mal peut être modifiée par un adverbe (si, trop) :
Le film était finalement pas si mal que ça. ■ Mon entretien s’est pas trop mal passé. ■ Comment tu as trouvé ce restau ? – Pas trop mal, je dois dire !
Cet emploi figé de la négation sans ne est un cas typique qui provoque des hypercorrectismes, par exemple dans les dialogues de romans ou de bande dessinée : pour ne pas utiliser un style rappelant trop le français parlé, certains auteurs expriment le ne dans les constructions négatives, qui est normalement supprimé dans la langue courante. Mais le simple fait de rajouter un ne ne suffit pas pour changer de style. Ainsi, la version dans le code écrit de c’est pas possible ! ne serait pas ce n’est pas possible ! mais plutôt (par exemple) c’est incroyable ! ou c’est inadmissible ! etc.
C’est le mot pas, en finnois « askel », qui servait au départ à renforcer la négation. On utilisait aussi d’autres noms pour renforcer la négation :
Je ne ferai pas. En kävele askeltakaan. ■ Je ne mangerai mie. En syö muruakaan. ■ Je ne voyais point. mot à mot En nähnyt pistettäkään. ■ Je ne vois goutte. En näe pisaraakaan.
Ne… point (= ne … pas), s’est conservé dans la langue soutenue ou dans un usage régional . Ne … mie ne s’emploie plus du tout, mais ne … mot, ne … goutte sont littéraires et se sont conservés dans quelques expressions plus ou moins figées :
Il n’y a point d’autre solution. ■ Il n’a dit mot. ■ On n’y voit goutte. Täällä ei näe metriäkään. ■ Je n’y comprends goutte. En ymmärrä siitä yhtään mitään.
Avec le temps, le nom pas, s’est peu à peu grammaticalisé pour devenir un adverbe de négation, et, dans le français parlé, il assure ainsi maintenant les fonctions de seul mot négatif. Selon Blanche-Benveniste (ALPF p. 39), 95 % des particules ne sont absentes dans les conversations quotidiennes chez les locuteurs de tous les âges et de toutes les couches sociales.
Dans le code écrit ou le style soutenu, les règles concernant ni sont assez compliquées :
a. Ni seul peut relier deux subordonnées négatives :
Je constate que vous ne l’acceptez ni ne le refusez. [= vous ne l’acceptez pas et ne le refusez pas].
b. Ni seul peut aussi relier deux sujets, dans un style très soutenu :
Le soleil ni la mort ne se peuvent regarder fixement. (= Ni le soleil ni la mort ne peuvent se regarder fixement.)
c. Si on relie deux verbes, ni est utilisé seul, mais ne doit être répété. De plus, ce n’est possible qu’avec un sujet qui est un pronom, et aux temps simples (pas aux temps composés) :
Il ne mange ni ne boit. [Il ne mange pas et ne boit pas.] ■ Il n’avance ni ne recule. [= Il n’avance pas et ne recule pas.]
Recommandation : au total, on peut dire que pour l’étudiant de français langue étrangère, l’emploi de ni n’est pas très facile, sauf quand on l’utilise après ne… pas. Le plus simple est d’utiliser ne…pas … et (ne) …pas :
Je ne peux pas partir : je n’ai pas de passeport et pas de visa. ■ Il ne mange pas et ne boit pas. ■ Le soleil et la mort ne peuvent pas se regarder en face. Etc.
La négation ne … guère est d’un emploi assez délicat. Elle s’utilise surtout dans le code écrit et peut toujours être remplacée par d’autres expressions.
a. grammaticalement, guère est un adverbe qui s’emploie toujours dans un sens négatif et, devant un complément de verbe direct, il entraine la transformation de l’article indéfini en de :
Elle a eu de la chance → Elle n’a guère eu de chance.
b. Sémantiquement, guère est en quelque sorte la forme négative de l’adverbe bien et, comme bien, il a une nuance subjective : la phrase il a eu beaucoup de chance est une constatation neutre ; il a eu bien de la chance ajoute un commentaire sous-entendu de la part du locuteur « moi, je trouve qu’il a vraiment eu beaucoup de chance » ou « moi, je suis étonné de voir la chance qu’il a eue. » etc. De même avec guère : il n’a pas eu beaucoup de chance est une constatation objective et neutre, tandis que il n’a guère eu de chance est plus subjectif et signifie « personnellement, je dirais qu’il a été vraiment malchanceux » ou « il est bien à plaindre, le pauvre » etc. Dans certains cas, cette nuance n’est pas très sensible et guère a une valeur plus objective. On peut dire ainsi :
Cette forme n’est plus guère employée. ■ La négation point ne s’emploie plus guère.
Dans ce cas, guère signifie « plus très souvent » ou « seulement rarement ».
Le ne explétif (pleonastinen ne) est une pseudo-négation héritée du latin qui s’est maintenue et qui est utilisée essentiellement dans le code écrit strict, dans certains cas bien précis. Il n’a pas de sens en lui-même, c’est pourquoi on l’appelle explétif (« qui sert à remplir la phrase sans être nécessaire au sens », définition du Grand Robert) et dans le français parlé on ne l’utilise pratiquement jamais.
Ne explétif n’a aucune valeur négative et peut toujours être supprimé sans que le sens de l’énoncé change. Malgré ce qu’affirment certaines grammaires et ce que pensent certains locuteurs, ne explétif n’apporte aucune information supplémentaire. Les deux phrases suivantes sont parfaitement équivalentes pour le sens :
Je crains qu’il ne faille tout refaire / Je crains qu’il faille tout refaire.
Ne explétif peut être considéré comme une décoration stylistique utilisée pour donner un ton plus soutenu (ylätyylinen sävy) au texte. On l’utilise dans le code écrit strict dans les subordonnées après un certain nombre de verbes et de conjonctions, et dans les propositions en fonction de complément de comparatif.
Le ne explétif peut s’utilise notamment dans des propositions complétives compléments de verbes exprimant la crainte, comme craindre, avoir peur, redouter, et de certains autres verbes comme empêcher, éviter, ne pas douter, ne pas nier :
Je crains qu’il ne soit trop tard. Pelkään, että on myöhäistä. ■ Il faut éviter qu’il ne soit mis au courant. ■ Nous redoutions qu’ils ne l’apprissent. Pelkäsimme, että he saisivat tietää pian. ■ Je ne doutais pas qu’il ne vînt bientôt. En epäillyt, etteikö hän tule.
Dans le code écrit courant et le français parlé, les mêmes phrases seraient :
Je crains qu’il soit trop tard. ■ Il faut éviter qu’il soit mis au courant. ■ Nous redoutions qu’ils l’apprennent. ■ Je ne doutais pas qu’il viendrait bientôt.
Remarque : ne explétif n’est pas négatif. Pour exprimer la négation, il faut utiliser ne …pas. Comparer :
J’avais peur qu’il ne vienne. Pelkäsin hänen tulevan. ■ J’avais peur qu’il ne vienne pas. Pelkäsin, ettei hän tulisi.
Dans le code écrit strict, on utilise ne explétif dans les subordonnées introduites par avant que, à moins que, de crainte que, de peur que :
Va voir un médecin, avant qu’il ne soit trop tard . ■ Il ne prendra pas d’initiative, à moins qu’il n’y soit forcé. ■ L’acteur portait des lunettes de soleil noires, de peur qu’on ne le reconnaisse.
Comme dans le cas des verbes entrainant un ne explétif mentionnés ci-dessus, ne explétif après une conjonction n’est pas non plus négatif. Après des conjonctions comme de peur que, si on veut exprimer que la phrase est négative, il faut utiliser pas :
L’acteur portait une fausse barbe, de peur qu’on ne le reconnaisse dans la rue. ■ En arrivant au studio, l’acteur avait enlevé sa fausse barbe, de peur qu’on ne le reconnaisse pas.
Ne explétif peut s’utiliser dans le code écrit devant le verbe d’une proposition complément d’un comparatif. On peut également l’utiliser en combinaison avec le pronom le (qui est la forme CVD ou attribut du sujet du pronom ÇA), mais il n’est pas obligatoire :
C’était moins facile que je ne le pensais. ■ Il y a eu plus d’inscrits qu’il n’était possible d’en accepter. ■ Le finnois est bien moins difficile qu’on (ne) le prétend. ■ Ça a mieux marché que je le pensais. ■ La Finlande a eu moins de médailles qu’on ne l’attendait.
Ne explétif s’utilise également dans une proposition complément de plutôt :
Ces dames hurlaient plutôt qu’elles ne criaient. ■ Les langues naturelles se créent plutôt qu’elles ne sont créées à partir d’une langue mère. ■ Dans ce type d’exercice, les apprenants reconstruisent l’information plutôt qu’ils ne la transmettent l’un à l’autre.
Dans une proposition complément d’un comparatif d’égalité (aussi … que), on n’utilise pas ne explétif. Mais on peut utiliser le pronom le (facultatif) :
Ce n’était pas aussi dur que j(e l)’avais imaginé. ■ Ce n’est pas aussi compliqué qu’on pourrait (le) croire.
Dans le français parlé, on n’utilise pas le ne explétif.
L’usage à propos de ne explétif dans la comparaison est flottant : on utilise soit ne explétif seul, soit le pronom le seul, soit les deux ensemble (voir les exemples ci-dessus). Il y a même une quatrième possibilité, puisque dans le français parlé on n’utilise aucun mot particulier (ni le ni ne) :
Le finnois est bien moins difficile qu’on ne le prétend. [code écrit strict]
Le finnois est bien moins difficile qu’on ne prétend. [code écrit strict et courant]
Le finnois est bien moins difficile qu’on le prétend. [code écrit strict et courant]
Le finnois est bien moins difficile qu’on prétend. [code écrit courant et français parlé]
C’était moins facile que je le pensais. [code écrit strict et courant]
C’était moins facile que je ne pensais. [code écrit strict]
C’était moins facile que je pensais. [code écrit courant et français parlé]
C’était moins facile que je ne le pensais. [code écrit strict]
Ça a mieux marché que je pensais. [code écrit courant et français parlé]
Cela a mieux réussi que je ne (le) pensais. [code écrit strict]
Comme ne explétif est perçu comme « élégant », il n’est pas surprenant que beaucoup de gens l’utilisent un peu n’importe comment. On trouve des cas où ne explétif est employé inutilement dans des cas qui ne sont pas ceux présentés ci-dessus, par un phénomène d’analogie (ou par hypercorrectisme) :
Mon premier triathlon était pour des débutants (400 m de nage, 22 km en vélo et 5 km à pied) et ce n’était pas aussi difficile que je ne craignais. [relevé dans un blog]
La litote (finnois litoteesi) est un mode d’expression qui consiste à dire une chose négativement pour dire en réalité le contraire : l’affirmation est atténuée, mais devient par là-même encore plus forte. On utilise aussi la litote en finnois (l’expression familière finnoise ei voisi vähempää kiinnostaa en est une, de même que vähän oli vaikeaa!), mais de façon moins systématique qu’en français. L’expression pas mal est un exemple typique de litote, qui s’est figée dans un sens positif. Si l’énoncé est une litote, il faut éviter de le prendre littéralement (sananmukaisesti), comme le montrent les traductions en finnois dans les exemples suivants :
Ce n’est pas une mauvaise idée. Se ei ole hassumpi ajatus. ■ Il n’est pas bête, cet enfant. Aika fiksu tuo lapsi. ■ Ce n’est pas facile, la grammaire française. Ranskan kielioppi on vähän vaikeaa. ■ C’était pas mal. Se oli ihan kiva. ■ Le voyage ne s’est pas passé sans difficulté, mais on a fini par arriver.
La litote est utilisée dans le code écrit, mais on peut dire qu’elle est encore plus fréquente dans le français parlé :
C’était pas de la tarte. Huhhuh, mikä homma! ■ Il est pas con, ce type ! Aika terävä tyyppi! ■ Il est pas moche, ce jardin. Siisti piha!
À une phrase négative qui exprime une litote, on répond affirmativement, et non pas négativement, ainsi que le font par erreur de nombreux apprenants de français langue étrangère (finnophones ou autres) :
C’était pas mal, n’est-ce pas ? — Oui, c’était pas mal. Ei ollut hassumpaa, eihän? – Niin, oli ihan kivaa. [Ne pas répondre : *Non, c’était pas mal.] ■ Il est pas mauvais, ce gâteau. — Oui, il est bon. Aika hyvä kakku. – Niin on. [Ne pas répondre : *Non, il est bon].
Ces deux expressions se ressemblent, mais ont un sens assez différent, et sont fréquemment confondues. Sans aucun doute correspond mot pour mot au finnois ilman epäilystäkään et ne pose généralement pas de problèmes.
L’expression qui pose des difficultés est plutôt sans doute, qu’il ne faut pas comprendre littéralement. Au lieu de signifier mot à mot ilman (sans) epäilystä (doute), elle signifie pratiquement le contraire : « epäillen, epäilyksellä ». Autrement dit :
1. sans aucun doute = ilman epäilystäkään, kieltämättä (« ilman mitään epäilystä ») = aivan varmasti, taatusti, ehdottomasti. La locution sans aucun doute a une variante sans nul doute, qui a le même sens :
La victoire de la Finlande au championnat du monde de hockey a sans aucun doute été ressentie comme un évènement historique.
2. sans doute = luultavasti, varmaan, todennäköisesti :
Tu crois que la Finlande va gagner ? – Sans doute. ■ La question est-elle donc résolue ? Oui, sans doute. Toutefois, des affirmations exceptionnelles méritant des preuves exceptionnelles, on est parfois tenté de jouer l’avocat du diable.
3. dans le code écrit strict, sans doute peut avoir son sens originel de « ilman epäilystä » (valeur concessive), et peut se traduire par kieltämättä ; à l’oral, on utiliserait par exemple c’est vrai ou (bon,) d’accord :
C’est là sans doute une décision raisonnable. Se on kieltämättä järkevä päätös ■ Déracinés sans doute, mais très connectés : grâce au téléphone portable ou aux réseaux sociaux sur le web, les migrants sont désormais moins coupés de leurs proches. ■ Une récompense sans doute, mais laquelle ?
Sans doute peut aussi avoir cette valeur dans le français parlé dans une argumentation, ou, assez fréquemment, dans une réponse. Sans doute équivaut alors en finnois à totta kai ou toki :
Vous devez quand même reconnaitre que le ministre a eu raison de retirer le projet.– Sans doute, mais, il aurait dû le faire plus tôt. ■ N’aurait-il pas mieux valu refinancer le projet dans son ensemble ? – Oui, sans doute, mais vous imaginez les conséquences politiques !
français | contexte | finnois |
sans aucun doute, sans nul doute | tous | epäilemättä, aivan varmasti, ilman epäilystäkään |
sans doute | sens habituel dans le code écrit et le français parlé | luultavasti, varmaan, todennäköisesti |
code écrit surtout, ou réponse à un argument (code écrit et français parlé) | toki, totta kai, kieltämättä |
En finnois, l’adverbe vain (« seulement ») peut, comme l’adverbe myös, se placer librement devant tout élément de la phrase sur lequel on veut faire porter l’idée de restriction : adjectif, nom, adverbe, quantifiant, verbe. En français, on ne peut pas utiliser seulement de la même manière, et les équivalents de vain varient beaucoup.
Quand vain porte sur un GN complément de verbe ou complément de phrase, on peut le traduire par ne … que ou seulement :
Vietin siellä vain kolme tuntia. Je n’y ai passé que trois heures. / J’y ai passé seulement trois heures. ■ Aitoa patonkia saa vain Ranskasta. La vraie baguette ne se trouve qu’en France. / La vraie baguette se trouve seulement en France. ■ Tilasin viisi kirjaa, mutta sain vain neljä. J’ai commandé cinq livres, mais je n’en ai eu que quatre. / J’ai commandé cinq livres, mais j’en ai eu seulement quatre.
À l’oral, (ne)… que est nettement plus fréquent que seulement, car il se réduit à une simple consonne /k/
: J’y ai passé que trois heures /ʒiepasektʁwazœʁ/
.
En finnois, l’adverbe vain peut porter sur un GN sujet. En français, seulement ne peut pas « modifier » un GN sujet (sauf dans certains cas, quand le sujet est quantifié, voir ci-dessous). Dans le code écrit, on utilise seul(es) devant un GN sujet indéfini. Si le GN est défini, on peut aussi utiliser la construction être le/la/les seul(es) à + infinitif ; à la place de l’infinitif, on peut aussi utiliser une construction relative :
Vain iso urheiluseura pystyy ostamaan tämän tasoisen pelaajan.Seul un grand club peut acheter un joueur de ce niveau. ■ Vain poliisi saa tutkia käsilaukkuasi. Seul un agent de police a le droit de fouiller ton sac. ■ Vain tämä merkki miellyttää asiakkaita. Seule cette marque plait aux clients. / Cette marque est la seule à plaire aux clients. / Cette marque est la seule qui plaise aux clients.
Quand le sujet est un pronom personnel, il se met à la forme pleine et se place avant l’adjectif seul :
Vain sinä pystyt auttamaan minua. Toi seul peux m’aider / Tu es le seul qui puisses m’aider / Tu es le seul à pouvoir m’aider.
Vain he uskovat siihen.Ils sont les seuls à y croire. / Eux seuls y croient.
Vain minä ymmärrän sinua. Moi seul(e) te comprends. / Je suis le seul (la seule) qui te comprenne.
Vain he olisivat voineet vastata. Elles seules auraient pu répondre. / Elles sont les seules qui auraient pu répondre.
Dans le code écrit courant et le français parlé, on utilise abondamment la construction il n’y a que… + pronom relatif ou il n’y a que… + que conjonctionnel. Cette construction est pratique pour rendre l’idée de vain précédant un sujet en finnois, mais elle permet également de faire porter la restriction sur d’autres éléments que le sujet de la phrase, selon un mécanisme analogue à celui des phrases clivées : la construction de la phrase et la forme du pronom relatif varient d’après la fonction du mot extrait. 20.6
Dans la relative introduite par il n’y a que, le verbe est le plus souvent au subjonctif, mais on trouve de nombreux cas avec indicatif (voir aussi le mode du verbe de la relative complétant un superlatif) :
Il n’y a qu’un grand club qui puisse acheter un joueur de ce niveau. ■ Il n’y que cette marque qui plaise / plait aux clients. ■ Il n’y a qu’un agent de police qui ait le droit de fouiller ton sac. ■ Il n’y a qu’eux qui auraient pu répondre. ■ Il n’y a qu’eux qui y croient. ■ Il n’y a que moi qui puisse vous aider. ■ Il n’y a que toi /jaktwa/
que j’aime. ■ Il n’y a que toi qui aies écrit. /jaktwakieekʁi/
■ Il n’y a qu’avec lui que je partirais en voiture. ■ Il n’y a que pour eux que je ferais ça.
Cette construction s’emploie aussi couramment à la forme négative :
Il n’y a pas que ça qui (prononcé /japaksaki/
) me dérange. ■ Il n’y a pas qu’à eux qu’arrivent de tels malheurs. ■ Il n’y a pas que les virus qui sont résistants ! Les préjugés aussi. ■ Il n’y a pas que les échanges monétaires qui sont enrichissants. ■ Si je comprends bien, il n’y a pas que les étrangers qui sont « sans papiers ». ■ Il n’y avait que pour ce pays et cette culture que j’étais prête à partir un an loin de tout. ■ Les blogueurs finissent par ne parler qu’aux blogueurs, il n’y a qu’eux qui les intéresent parce qu’il n’y a qu’entre eux qu’ils se comprennent.
Il n’y a que … qui/que et il n’y a pas que … qui/que sont très utilisés dans le français parlé, parce qu’ils se réduisent à /jak/
et /japak/
:
Y a que toi que j’aime. ■ Y a qu’en France qu’on trouve de la bonne baguette. ■ Y a pas que toi /japaktwa/
qui aies des problèmes . ■ Y a pas que lui /japaklɥi/
qui sache faire des belles photos. ■ Y a pas qu’à elle que ça arrive.
Cette construction est très fréquente dans le français parlé, nettement moins dans le code écrit, qui utilise d’autres moyens (voir ci-dessous). L’emploi du subjonctif n’est cependant pas systématique. Il exprime une nuance de but ou de conséquence (exemples a, b, c), qui n’est pas toujours très nette (exemple b et e avec indicatif). D’autre part, comme cet emploi du subjonctif à valeur finale est plutôt caractéristique du code écrit, il est normal qu’on ne l’emploie pas régulièrement dans le français parlé :
(a) Il n’y a que lui qui puisse nous aider.
(b) Mais il n’y a que pendant les soldes que je peux être vraiment fashion.
(c) Il n’y a pas que vous qui aimiez le foot. Et ole ainoa, joka pitää jalkapallosta.
(d) Il n’y a pas que toi qui saches faire la cuisine ! Et ole ainoa, joka osaa laittaa ruokaa.
(e) Il n’y a que deux personnes qui se sont inscrites.
À l’imparfait, on n’utilise que l’indicatif, étant donné que le français parlé n’emploie pas le subjonctif imparfait. Dans le code écrit, on utilise d’autres procédés (qui peuvent évidemment aussi s’utiliser quand la phrase est au présent) :
Il n’y avait qu’un grand club qui pouvait acheter un joueur de ce niveau. Code écrit : Seul un grand club pouvait acheter un joueur de ce niveau. ■ Il n’y avait que cette marque qui plaisait aux clients. Code écrit : Seule cette marque plaisait aux gens. / Cette marque était la seule à plaire aux clients. ■ Il n’y avait qu’eux qui y croyaient. Code écrit : Ils étaient les seuls à y croire. / Eux seuls y croyaient. ■ Il n’y avait pas que vous qui aviez des problèmes à cette époque. Code écrit : Vous n’étiez pas les seuls à avoir des problèmes à cette époque.
Quand vain porte sur un GN quantifié en fonction de sujet, on peut utiliser seul devant le GN déterminé ou seulement qui se met après le nombre ou le nom :
Tilastot osoittavat, että vain noin 10 % ranskalaisista matkustaa kesällä ulkomaille. Les statistiques montrent que seuls 10% des Français vont à l’étranger en été. / Les statistiques montrent que 10% seulement des Français vont à l’étranger en été. ■ Tänään vain yksi oppilas tuli myöhässä.Aujourd’hui, un étudiant seulement était en retard.
En début de phrase, seulement a un sens argumentatif et correspond à kuitenkin (voir Les adverbes à éviter en tête de phrase) :
J’ai téléphoné plusieurs fois, seulement il n’y avait personne. Soitin monta kertaa, mutta kukaan ei vastannut.
C’est pourquoi dans le code écrit on ne l’utilise pas pour traduire vain. En revanche, dans le français parlé, on peut aussi placer seulement avant le GN quantifié, car on met alors l’accent d’insistance sur le nombre, et l’intonation indique que seulement modifie le nombre et n’est pas à comprendre dans un sens adversatif :
Seulement deux personnes m’ont écrit.
Quand l’adverbe vain porte sur verbe, on utilise la construction ne faire que + verbe :
Hän vain toisti samoja latteuksia. Il ne faisait que répéter les mêmes banalités. ■ Jos vain luet tenttikirjan, se ei ole kovin tehokasta. Si tu ne fais que lire le livre pour l’examen, ce n’est pas très efficace. ■ Olen vain käväisemässä. Je ne fais que passer. ■ Varoituksista huolimatta hän vain poltti ja poltti. Malgré les avertissements, il ne faisait que fumer.
Dans cette construction, le finnois vain a deux valeurs : « se contenter de faire qch/se borner à faire qch » (ne pas se fatiguer à faire autre chose) ou « s’entêter à faire qch » (ne rien trouver de mieux, faire sans arrêt). Pour rendre l’idée de vain, on peut ainsi également utiliser ces verbes :
Il s’est borné à nous présenter des banalités. ■ Si tu te contentes de lire le livre pour l’examen, ce n’est pas très efficace. ■ Malgré les avertissements, il s’entêtait à fumer.
On peut également utiliser l’adverbe simplement :
*L’élève ne doit que lire le texte à voix haute. → L’élève doit simplement lire le texte à voix haute. ■ *Les élèves seulement posent des questions. → Les élèves posent simplement des questions.
Dans la langue courante, on utilise fréquemment une forme pseudo-clivée de ne faire que, tout ce que … c’est :
Tout ce qu’il a fait, c’est présenter des banalités. ■ Si tout ce que tu fais, c’est (de) lire le livre pour l’examen, ce n’est pas très efficace. ■ Tout ce qu’il fait, c’est regarder la télé du matin au soir. ■ Tout ce qu’il a dit, c’est qu’il viendrait demain, sinon je ne sais rien de plus.
La conjonction de est facultative et assez peu employée dans ce cas (mais on l’entend utiliser). Cette tournure pseudo-clivée est un moyen pratique de contourner le problème de ne…que dans une principale qui détermine une complétive introduite par que. En effet, pour traduire tiedän vain että…, on ne peut pas dire *je ne sais que que… (exemple : tiedän vain, että se on peruutettu *je ne sais que que c’est annulé). On dira donc par exemple :
Tout ce que je sais, c’est qu’il viendra demain. ■ La seule chose que je sais, c’est qu’il viendra demain. ■ Je sais seulement qu’il viendra demain. ■ Je sais seulement une chose : il viendra demain. ■ Tout ce que je sais, c’est que c’est annulé. ■ Siitä tekstistä voidaan sanoa vain, milloin se on kirjoitettu, ei missä. Tout ce qu’on peut dire au sujet de ce texte ou La seule chose qu’on puisse dire au sujet de ce texte, c’est quand il a été écrit, pas où. ■ Minä sanoin vain, että teen sen, en milloin teen sen.J’ai seulement dit que je le ferais, pas quand je le ferais. ou : Tout ce que j’ai dit, c’est que je le ferai, pas quand je le ferai. (et non pas *Je n’ai dit que que…)
Dans le français parlé, vain ou pelkkä peuvent aussi être rendus par la construction rien que :
Rien qu’à te regarder, j’ai compris que tu t’étais levé du pied gauche. Jo kun näin sinut, tajusin, että olit noussut väärällä jalalla.. ■ Rien que dans la première page il y avait déjà 14 coquilles. Pelkästään ensimmäisellä sivulla oli jo 14 painovirhettä.. ■ Il m’a fallu deux heures rien que pour repeindre une fenêtre. Minulta meni kaksi tuntia pelkästään yhden ikkunan maalaamiseen. ■ Rien qu’à sa démarche, on le reconnait de loin. Jo pelkästä kävelytyylistä hänet tuntee kaukaa.
Sinä vain luet kirjojasi. Toi et tes livres ! ■ Tulen heti – vaihdan vain vaatteet. Je me change et j’arrive. ■ Mitä asiakas tekee? – Istuu vain. Que fait le client ? – Rien. ■ Tule vain! Entre ! ■ Sano vain! Dis-le ! ■ Tämä lienee vain positiivista. Cela ne peut être que positif.
Le mot vaan est une conjonction de coordination qui s’emploie en finnois pour introduire une assertion affirmative après une assertion négative. Elle correspond, par exemple, à l’allemand sondern ou au suédois utan, mais elle n’a pas d’équivalent direct en français. On peut souvent traduire vaan par mais, mais il faut aussi souvent le rendre par d’autres tournures (présentées plus loin ci-dessous) :
Puussa on paljon omenia, vaan ei juuri yhtään ilman matoja. Notre pommier a beaucoup de pommes, mais pratiquement pas un seule qui ne soit pas véreuse. ■ Meillä ei ole mitään menetettävänä, vaan kaikki voitettavana. Nous n’avons rien à perdre mais tout à gagner. ■ ei tänään vaan huomenna pas aujourd’hui mais demain ■ Tärkeintä ei ole voitto vaan osanotto. L’important n’est pas de gagner, mais de participer.
Dans la construction ei ainoastaan… vaan myös…, le mot vaan se rend aussi par mais :
Hän ei vain huutanut, vaan myös solvasi ihmisiä. Non seulement il criait, mais il insultait aussi les gens. ■ Le mode de représentation ne concerne pas seulement des noms concrets, mais aussi des noms abstraits. ■ Ces tournures sont non seulement agrammaticales mais aussi incompréhensibles.
Quand on reprend une assertion pour la corriger, on exprime généralement l’idée de vaan par une asyndète, autrement dit par l’absence de coordination, en reprenant à la forme affirmative la phrase qui était à la forme négative. Cette tournure est très utilisée à l’oral, en particulier, mais aussi à l’écrit dans des phrases relativement courtes :
Cette année il ne m’a pas offert une cravate, il m’a offert une chemise. ■ Il ne boit pas du vin, il boit du cidre. ■ Je ne veux pas ce livre-là, je veux celui-ci. ■ Finalement, on n’a pas acheté des skis, on a acheté un snowboard. ■ Je n’ai pas dit qu’on irait en Sicile, j’ai dit qu’on irait en Sardaigne. ■ L’important, ce n’est pas de gagner, c’est de participer.
L’asyndète permet aussi de rendre vaan dans d’autres cas de façon beaucoup plus idiomatique que par mais :
En voinut vastustaa kiusausta vaan ostin upouuden Leican. Je n’ai pas pu résister, j’ai acheté le dernier Leica. ■ Hän ei tehnyt sitä ilkeyttään, vaan hänet pakotettiin siihen.Il ne l’a pas fait par méchanceté, on l’y a poussé. ■ Nyt ei tarvita puheita, vaan tekoja! Assez de paroles, des actes ! ■ Älkää odottako kädet ristissä, vaan tehkää jotakin! Ne restez pas les bras croisés, réagissez !
Le deux-points est souvent un moyen très pratique de rendre en français vaan :
Hän ei ole naimisissa eikä eronnut vaan leski. Il n’est ni marié ni divorcé : il est veuf.
Le point-virgule est aussi un moyen commode d’exprimer la même valeur d’opposition :
Sovintoon ei päästy, vaan tilanne kärjistyi entisestään. Aucun accord n’a pu être trouvé ; au contraire la situation est devenue encore plus tendue.
En finnois, vaan s’emploie également dans diverses expressions, dans lesquelles il ne peut pas être exprimé en français par tel ou tel mot précis. Ci-dessous quelques exemples, avec des suggestions de traductions possibles :
Siitä vaan yrittämään! Tu peux / Vous pouvez toujours essayer ! ■ Se ei vaan toimi. Rien à faire, ça ne marche pas. ■ Kappas vaan! Ça par exemple ! / Tiens donc ! ■ En minä vaan tiedä! J’en sais rien, moi ! ■ Siitä vaan, mene kertomaan hänelle loputkin! Pendant que tu y es, va lui dire le reste aussi ! ■ Jos et halua lähteä mukaan Tahitille, sitä vaan! Matka tulee halvemmaksi. Si tu ne veux pas partir avec nous à Tahiti, qu’à cela ne tienne, le voyage reviendra moins cher !
13. La phrase négative. Mise à jour 26.2.2024